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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 octobre.

Quel sera donc le dénoûment de nos étranges et malheureuses affaires de France ? Comment réussira-t-on à sortir de cet inextricable fouillis ? — Il eût été bien plus simple, direz-vous avec la vaine amertume des regrets inutiles, il eût été bien plus simple de ne pas se mettre dans ce gâchis, de s’arrêter lorsqu’il était encore temps, d’avoir le bon sens, le courage de rompre avec les faux systèmes et les fausses politiques, avec tout ce qui a compromis et perdu la paix morale, l’ordre régulier, les ressources, la fortune de la France. C’eût été bien simple, en effet, c’eût été de plus assez facile. On le pouvait sans peine, on était poussé par la nécessité des choses, on était éclairé par toutes les expériences du passé, on devait être retenu par le sentiment le plus vulgaire de sécurité publique, prévenu par les avertissemens qui éclataient sous toutes les formes.

C’était tout simple, mais on n’en a rien fait, on s’en est bien gardé. On a pris une autre voie, on s’est étudié à ébranler tout ce qui existait, sous prétexte qu’il y avait des réformes à réaliser. On a préféré, sous les apparences d’une prétendue politique républicaine, faire du pouvoir la proie des passions et des cupidités de parti, se servir des lois sans scrupule, fausser les institutions, violenter les croyances, épuiser les finances publiques dans des entreprises ruineuses, mettre à sac tout ce qui fait la puissance morale et matérielle de la France. Les politiques de ce genre produisent naturellement, fatalement, leurs fruits. La politique qui a été pratiquée depuis dix ans, à part l’impuissance et l’humiliation de ceux qui l’ont inaugurée, a produit, cela est certain, dans le pays, une immense fatigue, un insurmontable dégoût, un appauvrissement universel, une irritation sourde provoquée