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NOTRE
ARTILLERIE DE CAMPAGNE

On parle beaucoup en ce moment du fusil Lebel, et on ne paraît pas se douter que l’adoption de la poudre sans fumée, qui est le caractère le plus saillant de cette arme, est infiniment plus avantageuse pour l’artillerie que pour l’infanterie. L’Instruction pour le combat qui est en passe de remplacer les fameux « Fascicules, » a attiré l’attention du public; c’est à peine si on a entendu parler des nouvelles méthodes de réglage du tir de campagne qui viennent d’être expérimentées aux écoles à feu de cette année, et dont la possession assure à notre armée un surcroît considérable de puissance. On ignore que la tactique de l’artillerie a subi, au cours de ces derniers mois, des perfectionnemens depuis longtemps désirés, que le matériel même s’est amélioré (sinon le canon, du moins sa poudre et son projectile), que la constitution du corps a subi des remaniemens dont l’importance n’est pas contestable. Les journaux, qui ont conté tout au long les manœuvres de cavalerie du camp de Châlons, n’ont guère dit qu’un mot, en passant, des évolutions de batteries qui ont eu lieu sur le même terrain.

A quoi tient cette sorte d’injustice? Ce n’est certes pas à l’indifférence du public. Dieu merci, tous les Français aiment l’armée, et, s’ils ont au fond du cœur une secrète préférence, c’est pour l’artillerie. Mais il est difficile, lorsqu’on veut exposer les progrès accomplis par cette arme « savante, » d’éviter les termes techniques et les explications toujours un peu arides que comportent les descriptions d’engins mécaniques. Les mots mêmes de balistique ou de logistique effarouchent le lecteur, et on hésite à les employer. Or, il