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puerpérales, a cessé d’être l’agent inconscient de ces terribles épidémies, qui, plus que toutes les autres, semaient autour d’elles la désolation. En médecine enfin, si les résultats obtenus sont moins appareils, — ce qui tient à la nature même de l’objet de la médecine, — on constate cependant une rénovation presque totale des méthodes et de l’arsenal de la thérapeutique, qui n’ont plus qu’un but, réaliser l’antisepsie du milieu interne, comme la chirurgie réalise celle du milieu extérieur. On a beaucoup critiqué cette prétention de la médecine de vouloir faire l’antisepsie dans les liquides et les tissus de l’organisme, et on a dit qu’en voulant poursuivre les microbes dans les malades, on tuerait en même temps les uns et les autres. Mais cette critique n’a vraiment que la valeur d’un jeu de mots, et l’existence des médicamens spécifiques, connus depuis bien longtemps, mais dont la théorie microbienne seule a pu expliquer l’action, médicamens tels que le sulfate de quinine, les iodures de potassium et de sodium, ou les sels de mercure, est une preuve qu’il est possible de tuer les microbes ou du moins d’entraver suffisamment leur développement sans tuer les malades. Il n’y a nul doute que les recherches entreprises en ce moment de mille côtés ne parviennent, à courte échéance, à doter la thérapeutique des maladies internes de nouveaux spécifiques, c’est-à-dire de substances extrêmement nuisibles, à faibles doses, à telle ou telle espèce de microbes pathogènes. Ce que le hasard a fait lentement dans les siècles précédons, la science le fera, de nos jours, sûrement et rapidement. Et, à ce propos, nous citerons ces élégantes expériences de M. Raulin, qui montrent dans quelles limites étroites il est nécessaire de varier la composition des liquides de culture pour s’opposer au développement des microbes. Ainsi M. Raulin, recherchant la nature des substances qui sont indispensables à la végétation d’une moisissure commune, l’aspergillus niger, vit que ce champignon ne pouvait se développer dans un milieu qui ne contenait pas au moins 1/50,000e de zinc, et qu’il était en même temps si sensible à l’action de certains élémens nuisibles, que sa végétation s’arrêtait brusquement si, au liquide nourricier, on ajoutait seulement 1/1,600,000e de nitrate d’argent. Bien plus, cette végétation ne peut même pas commencer dans un vase d’argent, bien que la chimie soit presque impuissante à montrer que quelques particules de la matière du vase se dissolvent dans le liquide. Ces expériences prouvent qu’il serait bien imprudent de déclarer impossible la lutte contre les microbes au sein même de l’organisme, en même temps qu’elles jettent quelque lumière sur la nature mystérieuse des tempéramens et des constitutions, dans leurs rapports avec les maladies infectieuses. Qui n’a été frappé, en effet, par la résistance de certaines personnes aux diverses maladies contagieuses, et, au