et les serve. » L’Autriche se sentit froissée, à juste titre, des discussions de l’église Saint-Paul ; elle pouvait répondre, scandalisée, comme le personnage de la comédie : — « Mais il n’est question dans ce contrat que de ma mort. »
M. de Bismarck, auquel il en faut toujours revenir lorsqu’on étudie l’Allemagne nouvelle, sacrifiait, à cette époque, à d’autres dieux. Sa montre retardait ; il en était encore au culte de la sainte-alliance ; adversaire provocant des aspirations nationales, il prêchait dans la seconde chambre prussienne le respect de la Russie et de l’Autriche. M. de Gagern, plus avisé, lui traçait, au mois d’octobre 1848, le programme dont il devait faire trente ans plus tard, en 1879, le dogme fondamental de sa politique. L’Autriche est aujourd’hui telle que la rêvait, en 1848, le président de l’assemblée nationale, à la remorque de l’Allemagne, son boulevard contre la Russie et l’agent subordonné de l’influence germanique à Constantinople. Des deux côtés de la Leitha, ses hommes d’état règlent leurs actes et leurs paroles, — on l’a vu récemment, — d’après le mot d’ordre qui leur vient de Friedrichsruhe.
Au sortir de l’église Saint-Paul, M. de Gagern se rendit à Berlin pour exposer sa politique à Frédéric-Guillaume et livrer un assaut suprême à ses scrupules ; son éloquence parut l’emporter, car, peu de jours après, on apprit que la chambre prussienne, qui prenait le contre-pied du parlement de Francfort, était dissoute, et que le roi venait d’octroyer à ses sujets une constitution libérale. Il était évident qu’en se jetant, du jour au lendemain, dans la voie constitutionnelle, la Prusse, poussée par ses partisans, espérait s’emparer du mouvement unitaire au détriment de l’Autriche. Le roi s’était laissé entraîner à une grosse résolution ; il avait fait un pas décisif, mais rien ne garantissait aux nationaux qu’il irait jusqu’au bout, et mettrait sur sa tête la couronne qu’ils allaient lui offrir. Comment recevoir l’empire des mains d’un parlement révolutionnaire ? Comment surtout obtenir l’assentiment des souverains allemands ? Ces questions redoutables, évidemment, n’étaient pas résolues dans l’esprit vacillant de Frédéric-Guillaume IV.
L’Autriche, dont on disposait si cavalièrement, allait du reste, après l’abdication de Ferdinand Ier au profit de François-Joseph, rentrer en scène avec le prince de Schwartzenberg, un ministre énergique, déterminé, qui n’entendait pas se soumettre aux injonctions des parlementaires de Francfort ni prêter la main aux visées ambitieuses de la Prusse.
L’assemblée nationale, en votant l’exclusion de l’Autriche de l’Allemagne, avait inconsidérément décrété sa fin prochaine. Les deux grandes puissances allemandes qui jusque-là s’étaient bornées à se mesurer du regard, sans intervenir ouvertement dans ses débats,