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l’avènement au trône de François-Joseph et l’audacieuse énergie de son ministre le prince de Schwartzenberg ; — le refus de Frédéric-Guillaume d’accepter la couronne impériale ; — l’union restreinte des petits états du Nord sous l’hégémonie prussienne ; — le parlement d’Erfurth opposé à celui de Francfort ; — le post-parlement de Stuttgart ; — la fuite de Cassel de l’électeur après le refus de l’armée de lui sacrifier la constitution hessoise et, finalement, la capitulation de la Prusse à Olmütz, pour que la diète, emportée par le souffle révolutionnaire de 1848, pût, après dix-huit mois d’anarchie, ressusciter de ses cendres et reparaître en scène, dans l’esprit des traités de 1815, sans avoir rien appris ni rien oublié.

Dans ces temps agités, les courans violens et capricieux changeaient de semaine en semaine, et souvent du jour au lendemain. L’influence de l’Autriche et de la Prusse subissait leurs fluctuations ; elle diminuait ou grandissait selon les impressions du moment. Au mois de juillet, l’Autriche avait le vent en poupe, toutes les sympathies se reportaient sur elle ; elle semblait définitivement appelée à présider aux destinées de la grande Allemagne. Mais bientôt, à la fin de 1848, après un long effacement, la Prusse secouait sa torpeur ; ce que le cabinet de Vienne avait fait, elle l’entreprit, elle s’adressa aux chefs de la démocratie, elle corrompit la presse, elle mit ses soldats au service des princes en lutte avec leurs sujets ; déjà elle avait mis ses armées au service des passions populaires dans les duchés de l’Elbe contre le Danemark. Sa puissance militaire s’imposait à tous, aux souverains et au parlement, d’autant plus que les armées autrichiennes en étaient réduites à assiéger vienne, à bombarder Prague, et, sur tous les points de l’empire, se trouvaient en lutte avec l’insurrection. On reconnaissait, d’un jour à l’autre, que l’Autriche, aux prises avec ses nationalités, ne pouvait avoir que des rapports secondaires avec l’Allemagne, tandis que la Prusse, partout allemande, — on oubliait le duché de Posen, — était la nation germanique par excellence, par sa géographie, par ses intérêts économiques et par son organisation militaire.

Il y avait peu de semaines que la Prusse était l’objet des attaques les plus violentes du haut de la tribune de l’église de Saint-Paul, qu’on outrageait son roi et son gouvernement, et soudainement, ensuite d’une évolution de l’opinion, on se rapprochait d’elle, prêt à lui confier les destinées de l’empire.

« Au mois d’août, écrivais-je, le 18 octobre, dans le tableau que je traçais de la situation, on rêvait encore à Francfort un empire centralisé comprenant non-seulement la Prusse, les états du Nord et du Midi, mais aussi l’Autriche avec ses nationalités si diverses. De pareilles illusions ne sont plus permises. L’Autriche est livrée aux guerres de race ; les liens qui la rattachent à l’Allemagne se