de ruse et de vitesse avec ses adversaires, mais en reculant toujours, et sa retraite sera en même temps, pour l’insurrection en général, le commencement de la décadence.
Le 7 mars, à six heures du matin, après une course de 40 lieues en vingt-quatre heures, il surprit, entre Berouaghia et Boghar, le maghzen du Titteri et fit un butin considérable ; mais ce butin allait ralentir sensiblement sa marche. En effet, à deux heures de l’après-midi, dans la même journée, il fut atteint par le colonel Camou, qui lui tua 70 hommes et lui prit 250 chevaux harnachés, 1,000 chameaux, 25,000 têtes de bétail. Ce grand succès piqua d’émulation le général Jusuf.
Le 13, à cinq heures du matin, Jusuf aperçut la fumée d’un campement arabe ; un petit goum envoyé en avant reconnut bientôt la présence de l’émir, qui, sans essayer d’organiser la résistance, ne songea qu’à se dérober au plus vite. Successivement abandonné par ceux qui avaient suivi, au début, sa fortune grandissante, quand la poursuite cessa, il n’avait plus avec lui que quatorze fidèles. On lui prit 800 mulets chargés. Deux prisonniers français, le lieutenant de Lacotte, chef du bureau arabe de Tiaret, et l’interprète Levi, pris à Sidi-Brahim, furent retrouvés dans le camp, mais cruellement blessés par leurs fanatiques gardiens. L’interprète ne survécut que peu d’heures ; on put sauver le lieutenant, qui avait reçu trois coups de feu. La surprise avait été faite à 8 lieues au sud-ouest de Bou-Sâda.
Allégé par la perte de. ses bagages, Abd-el-Kader fuyait vers le Djebel-Amour ; dans ces parages, il avait pour adhérons les nombreux douars nomades des Ouled-Naïl, et des renforts d’hommes et de chevaux lui venaient de la deïra.
Par les ordres du maréchal, des convois de chameaux avaient apporté, pour le ravitaillement de la colonne Jusuf, à El-Béida, au pied du Djebel-Amour, un grand approvisionnement de vivres. De cette base d’opération, Jusuf ne cessa pas, pendant tout le mois d’avril, de pousser des pointes dans toutes les directions, à la recherche de l’émir dont il avait de nouveau perdu la trace ; mais s’il ne parvenait pas à l’atteindre, ses courses n’étaient pas tout à fait inutiles, car elles eurent pour effet de réduire les Ouled-Naïl à l’obéissance. Le 1er mai, le duc d’Aumale lui amena des troupes fraîches ; le prince avait voulu, en descendant jusqu’à El-Béida, se rendre compte des progrès de la soumission dans ces régions lointaines.
Ce fut en ce temps-là, pendant qu’Abd-el-Kader était dans le Djebel-Amour, qu’à plus de 100 lieues de distance un crime exécrable, le massacre des prisonniers français, ensanglantait la deïra