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REVUE LITTERAIRE

L’Immortel, par M. Alphonse Daudet. Paris, 1888, Lemerre.

Si peut-être, en écrivant l’Immortel, M. Alphonse Daudet, comme je me le suis laissé dire, avait eu l’intention « d’asséner » à l’Académie française un coup dont « la vieille dame » ne se relevât plus, — ce sont les expressions d’un article du Figaro, — il a pu s’apercevoir, depuis que son livre a paru, qu’il avait manqué son affaire, et que la partie n’était pas si facile à gagner. Jamais, en effet, on n’avait tant parlé de l’Académie française que depuis que M. Daudet s’est avisé de la caricaturer ; jamais pour la défendre on n’avait trouvé de meilleures raisons ; et jamais, quant à moi, je n’avais mieux compris l’utilité de son institution qu’en lisant l’Immortel. Ainsi, parfois, nos intentions tournent contre nous-mêmes, et le hasard a de ces ironies. Non-seulement ce n’est pas à la popularité de l’auteur du Nabab et de Sapho, c’est au bon renom, et, si je puis dire, c’est à la vitalité de l’Académie française que l’Immortel aura dû son succès d’un jour ; mais encore, et plus tard, comme tant d’autres satires, c’est à l’Académie qu’il devra de survivre, ce n’est pas à l’homme de talent, dont nous avons regret à constater qu’il est sans doute l’un des moins bons romans.

C’est qu’aussi bien, et d’abord, puisqu’il voulait s’expliquer sur l’Académie, M. Daudet, dans son Immortel, n’a rien dit ou presque rien de ce qu’il y en avait à dire. Et, il est vrai qu’il ne le pouvait pas, le seul reproche un peu grave que l’on doive adresser à l’Académie étant précisément ce qui ferait son unique excuse aux yeux de M. Daudet et des « plus parisiens de ses amis de lettres. » Mais, c’est bien celui qu’elle mérite, et que, pour ce motif, on nous