les états-généraux et l’Angleterre, à exploiter, au profit de la paix, les haines réciproques de leurs marchands et les rivalités de leurs généraux, et à miner ainsi par sa base la grande alliance ; promettant, en secret, à la Hollande de lui livrer une barrière désormais inviolable, à l’Angleterre de lui remettre Ostende, Nieuport ou Dunkerque, et d’ouvrir ainsi à son commerce l’accès des côtes flamandes. Bien que la Hollande fût devenue notre implacable ennemie à la suite des désastres que lui avait infligés, en 1672, la vengeance de Louis XIV et des outrages dont son ambassadeur Heinsius avait été l’objet à Paris trois ans plus tard, on a espéré la séduire par l’appât des avantages mercantiles. Le marquis d’Alègres, prisonnier de guerre, et le médecin Helvétius, qui s’est rendu de France à La Haye sous le prétexte d’y faire imprimer quelques opuscules scientifiques, ont été chargés, au début, de ces ouvertures mystérieuses. D’Alègres a pu, moyennant 2 millions de livres, acheter le concours ou, tout au moins, l’inaction de Marlborough. Stériles tentatives ! L’intérêt, la haine, l’enthousiasme des communes victoires, ont fortifié et resserré le faisceau de la coalition. Le vainqueur de Blenheim s’est montré scrupuleux, incorruptible. On l’a vu mettre au service de l’union un zèle infatigable, et se rendre successivement à La Haye, à Berlin, à Vienne, pour en plaider la cause avec une chaude éloquence. Les prétentions de nos ennemis sont devenues de jour en jour plus agressives et plus insolentes. Le triumvirat de la ligue les inspire, les dirige, les défend, et il s’est montré impitoyable[1].
Louis XIV a envoyé en Hollande les plus avisés, les plus sûrs, les plus autorisés de ses diplomates, Ménager, le président Rouillé, le marquis de Torcy, ministre des affaires étrangères, le maréchal d’Huxelles et l’abbé de Polignac ; il a fait successivement les plus importantes, les plus humiliantes concessions, offrant, en 1706, aux états-généraux, le rétablissement du tarif libéral de 1664, ainsi qu’une forte barrière dans les Pays-Bas et l’Espagne à l’empereur, pourvu que Philippe V conservât l’Italie[2] ; en 1709, tout d’abord, l’Espagne, les Indes, les Pays-Bas, le Milanais, la reconnaissance officielle de la reine Anne et la démolition des fortifications de Dunkerque, sous la seule condition que Philippe gardera Naples et la Sicile[3], puis Tournay, Lille, Strasbourg, et l’expulsion du prétendant[4] consentant, l’année suivante, non-seulement à rappeler son armée d’Espagne, mais encore à concourir, par des subsides,