Page:Revue des Deux Mondes - 1888 - tome 86.djvu/97

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
L’EXTENSION
DU
FONCTIONNARISME DEPUIS 1870

La catégorie des fonctionnaires civils, en activité ou en retraite, se compose, d’après le dernier recensement de la France, d’environ 1 million de sujets, y compris les. femmes, les enfans et les domestiques des titulaires. Sur 37 personnes qui passent dans la rue, il y en a donc une en moyenne qui, directement ou indirectement, vit du budget, c’est-à-dire de la bourse publique, et dont la destinée en ce monde consiste à s’occuper des affaires des autres. A ce million de gens consacré aux besognes pacifiques s’ajoute plus d’un demi-million réservé aux soins de la guerre, sur terre ou sur mer. Il est ainsi, sur notre sol natal, 1 individu sur 24 (soit 4 pour 100) chargé de confectionner nos lois, de juger nos différends, d’arrêter nos malfaiteurs, de signer des traités, de prendre part aux batailles, de nous instruire et de nous faire payer l’impôt.

C’est une grosse proportion ; il ne serait pas sans intérêt de la comparer à celle des états voisins, mais ceci me mènerait trop loin ; d’autant que l’on pourrait toujours soutenir cette thèse que, si la France a plus de serviteurs que tel ou tel autre pays, c’est aussi qu’elle est mieux servie, et que le Français de 1888 vit plus heureux et plus libre, par exemple, qu’un citoyen de l’état indépendant du Congo, — le dernier venu dans l’almanach de Gotha, — qui, avec 27 millions d’habitans, n’a que 2 millions de budget et 83 fonctionnaires.