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très vif en Allemagne et en Angleterre. De grands efforts avaient été faits d’ailleurs, à Berlin surtout, pour enfler le chiffre des souscriptions et la prime du nouveau fonds s’est déjà élevée jusqu’à 6 pour 100.

La spéculation viennoise tend à sortir un peu de la torpeur ou l’avait plongée la crainte d’un conflit armé avec la Russie. Malgré les conférences militaires tenues sous la présidence de l’empereur, et qui ont pour objet de fixer le montant du crédit à demander aux Délégations en mai prochain, l’opinion publique se rassure. De plus, pendant tout le mois de mars, les établissemens de crédit autrichiens et hongrois ont publié leurs bilans et fait connaître les résultats bénéficiaires de leur activité en 1887. Ces résultats sont très satisfaisans, en dépit des alertes politiques qui ont deux fois, l’an dernier, troublé profondément les marchés du continent. D’une manière générale, les dividendes répartis sont sensiblement égaux à ceux de l’exercice précédent.

Il s’est manifesté une certaine hésitation depuis deux semaines parmi les acheteurs et porteurs de rente Extérieure. Il n’y a aucune illusion à conserver sur l’importance du déficit que laissera le budget de 1888-1889. Le ministre des finances, M. Puigcerver, évalue ce déficit à 80 ou 100 millions. Pour le couvrir, il a présenté en février diverses propositions d’impôts sur les alcools et les pétroles, et de surtaxes sur les cédules, en même temps que la révision des droits d’octroi. Ces projets sont vivement combattus par nombre de sénateurs et de députés, et par les chambres de commerce. Mais le ministre déclare qu’il se retirera s’ils ne sont pas adoptés, ne trouvant aucun autre moyen d’établir l’équilibre budgétaire. Le président du conseil fait tous ses efforts pour prévenir ce conflit menaçant. M. Puigcerver continue ses négociations avec la Banque d’Espagne en vue d’un emprunt de 200 millions de pesetas. Il s’agit aussi de faire prendre par cet établissement pendant cinq années, à 3 pour 100 l’an, la charge de la dette flottante, qui s’élève à 150 millions. L’Extérieure s’est maintenue longtemps à 67 3/4, et s’est élevée brusquement le dernier jour à 68 1/2.

Une grosse faillite a fait éclater à Rome la crise immobilière qui couvait lentement depuis plusieurs mois. Les embarras monétaires de la péninsule ne cessent de s’accroître depuis l’ouverture de la guerre de tarifs entre la France et l’Italie. D’autre part, les frais de l’expédition de Massaouah sont toujours aussi considérables. Bien que la rente italienne se tienne avec fermeté aux environs de 94.60, la spéculation ne laisse pas de considérer l’avenir avec quelque anxiété, et les porteurs de titres sont plus disposés à vendre qu’à grossir leur portefeuille d’une rente d’état dont le crédit paraît sérieusement ébranlé. Du milieu à la fin du mois, malgré la hausse générale, la rente italienne ne gagne que 0 fr. 17 à 94.67.


Le directeur-gérant : C. BULOZ.