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REVUE MUSICALE

Théâtre de la Monnaie de Bruxelles : Jocelyn, opéra en 4 actes, tiré du poème de Lamartine, paroles de MM. A. Silvestre et V. Capoul, musique de M. Benjamin Godard. — La Gioconda, opéra en 4 actes, paroles de M. Gorris, traduction de M. P. Solanges, musique de Ponchielli. — Concerts du Conservatoire de Bruxelles. — Opéra-Comique : Reprise de Madame Turlupin, opéra-comique en 2 actes, de MM. Cormon et Grandvallet, musique de M. Ernest Guiraud.

« Ni cet excès d’honneur, ni cette indignité. » L’on a dit de Jocelyn trop de bien et trop de mal. L’œuvre de M. Benjamin Godard n’est sans doute ni Don Juan, ni Guillaume Tell, ni Lohengrin, ni Carmen ; mais ce n’est pas non plus,.. ici, ne nommons personne. « Que Jocelyn réussisse ou tombe, écrivait-on dès avant la représentation, une chose est certaine : c’est qu’il n’y aura ni une pensée de plus ni une pensée de moins dans le monde. » Une pensée de moins ! On ne voit pas trop comment une œuvre nouvelle enlèverait une pensée au monde. Mais une pensée de plus ! Excusez du peu, dirait le vieux maestro. Des pensées de plus, en art, il en éclôt trois ou quatre par demi-siècle à peine, et, pour en avoir une seulement, il ne faut rien que du génie. Or si quelqu’un a eu chez nous, depuis Bizet, le génie, si quelqu’un a trouvé une pensée de plus, celui-là encore, ne le nommons pas, de peur d’offenser les autres.

Sans doute, l’œuvre de M. Benjamin Godard n’est pas une révélation. Elle n’apporte pas un verbe nouveau, et quelquefois même elle s’en tient trop à l’ancien. On rencontre là du Gounod, du Massenet ; mais on y rencontre aussi du Godard, du médiocre et du bon. Car il y a du