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aiment à déployer leur force et leur adresse. Peu à peu, pourtant, le niveau de l’instruction s’éleva et, à l’heure actuelle, le programme des études comprend l’anglais, le sanscrit, l’indou, le persan, l’ourdou, parlé par 100 millions d’hommes, l’arithmétique, l’algèbre, les élémens d’Euclide, l’histoire et la géographie. En 1882, l’établissement comptait quatre-vingt-deux élèves, soumis, en outre, à un entraînement qui les encourageait à contracter des habitudes viriles. A la suite du collège d’Indore, il s’en est créé d’autres, mais l’exemple n’a pas été suivi partout. Le rapporteur du Blue Book demande avec force que les gouvernemens locaux soient invités à combler les lacunes qu’on signale encore.

Jusqu’à ce jour, la jeunesse musulmane s’était tenue à l’écart des maisons d’éducation européenne. Les rigides sectateurs du Prophète reprochaient aux Anglais de n’avoir à donner à leurs enfans ni instruction religieuse ni « bonnes manières. » Ces plaintes ont cessé : au collège d’Aligarh, l’éducation religieuse fait partie intégrante du programme ; les élèves y sont instruits dans la foi de leurs ancêtres, et le régime de l’établissement est de nature à rassurer complètement les parens au point de vue de l’instruction morale et du bon ton. Toutefois, l’internat est obligatoire pour tous les jeunes gens demeurant à une certaine distance de l’institution ; ils y trouvent une discipline combinée avec des jeux fortifians.

Voilà le résumé très succinct de ce qu’ont fait les Anglais dans la plus grande de leurs possessions ; leur œuvre d’assimilation n’est pourtant pas encore terminée, mais l’on peut s’en rapporter à eux pour affirmer que, d’ici à peu d’années, les fils des maharadjahs et des nobles indous, ceux des parsis et des mahométans, auront à leur usage et dans toute l’étendue de l’empire asiatique des maisons d’éducation parfaitement organisées.


II

Il est un fait digne de remarque venant à l’appui du second système, système qui consisterait à créer, à Paris, un vaste établissement d’étude, à l’usage de notre jeunesse coloniale.

Ce fait, le voici : lorsqu’il y a un peu plus de trente ans, les Européens eurent brisé les barrières qui fermaient l’accès de la Chine et du Japon, ces deux empires voulurent, aussitôt la paix signée, étudier les mœurs, les lois des barbares d’Occident, s’expliquer comment ces étrangers, en si petit nombre, avaient triomphé de leurs grandes armées, et fait sortir de leur léthargie plusieurs centaines de millions d’hommes.

Ce fut un de nos compatriotes, le regretté Prosper Giquel, qui,