d’un vaisseau naufragé, mais celui qui s’est étonné de la quantité de larmes que contiennent les yeux des rois et qui s’est écrié : « Orage du cœur, est-ce une goutte de votre pluie ?.. » C’est dans l’Armorique qu’il arrive à notre héros une aventure bien romanesque, et où il succombe à une tentation si attrayante et si naturelle que je ne me sens pas le courage de le gronder. Qui de nous serait assez barbare pour repousser une jeune vierge, belle comme l’Amour, et de plus druidesse, prophétesse, prêtresse et se croyant sorcière ?..
« Ce prétendu poème est le mauvais ouvrage d’un homme qui a un grand talent. »
Chateaubriand répond à Mme de Custine, plus affligée que lui des articles d’Hoffmann :
« Je n’ai pu aller chez vous, parce que j’ai couru pour affaires. Le grand ami (Fouché) s’est joué de nous. L’ordre d’attaquer vient de lui, vous pouvez en être sûre.
« Eh bien ! il n’y a pas grand mal, l’article est bête et ridicule, et il y a tant de louanges d’ailleurs que je souhaite n’avoir jamais pire ennemi. Je vous verrai demain à déjeuner.
« Vous êtes bonne et aimable, tranquillisez-vous ! Je ne fais que rire de cela. Cela m’amuse d’être attaqué littérairement par ordre et par un mouchard. »
On ne peut s’empêcher de jeter un regard en arrière et de se rappeler les articles de l’abbé Morellet sur Atala, et surtout ceux de Ginguené, lorsque parut le Génie du christianisme. Mme de Beaumont en était malade ; ses amis étaient obligés de les lui cacher. Quand on a eu le bonheur, pendant toute sa vie, d’inspirer de telles affections, a-t-on bien le droit d’étaler avec tant d’affectation le vide de son âme ?
Les critiques d’Hoffmann, auxquelles Mme de Custine était si sensible, et que Chateaubriand, au risque de réveiller les haines assoupies, prenait la peine de réfuter, dans les notes accompagnant la seconde édition de son livre, eurent, au milieu du silence de l’empire, un grand retentissement. Les stances célèbres de Fontanes nous disent bien le découragement dans lequel René était plongé. Autour de lui ses amis avaient espéré que le succès des Martyrs serait plus complet. L’enthousiasme était sincère parmi eux ; et il y en avait, comme Ballanche, dont l’imagination avait été tellement émue par la douceur de certaines phrases, par exemple, par ce chant mélodieux : u Légers vaisseaux de l’Ausonie, fendez la mer calme et brillante, » qu’ils ne pouvaient prononcer le nom de Cymodocée sans que leurs yeux se remplissent de larmes. Chênedollé, au contraire, avait dit judicieusement à Mme de Custine : « Chateaubriand