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DE SALONIQUE A BELGRADE

II.[1]
LA MACÉDOINE ET LA SERBIE.


Septembre 1887.


I.

Trente-neuf degrés à l’ombre, et un trajet de soixante lieues dans un wagon chauffé à blanc! Voilà le problème qui absorbe en ce moment toutes mes facultés. Allez donc faire des réflexions sur la grandeur et la décadence des péninsules, par une chaleur pareille! Le moindre effort d’esprit vous transforme en fontaine. Comme on devient indulgent pour les peuples paresseux, qui se trouvent mieux assis que debout, et couchés qu’assis ; — pour la campagne aride et morne qui dort au soleil ; — pour le train lui-même qui marche avec une lenteur patriarcale et s’éternise à toutes les stations. Pourquoi restons-nous en panne? Réponse invariable : la locomotive prend de l’eau. Je la comprends et je l’excuse; elle doit avoir le gosier sec, cette pauvre machine poussive ! Elle tire péniblement une file interminable, une espèce d’arche de Noé sur essieux, dans laquelle colis, bêtes et gens voyagent côte à côte, confondus dans une égale résignation. Puisqu’elle boit, faisons comme elle. Voici justement de très jeunes marchands d’eau : ils

  1. Voyez la Revue du 1er janvier.