d’attacher à l’application de tel ou tel système plus d’importance qu’elle n’en attache elle-même.
Ce n’est pas tout. A supposer même, — ce qui serait bien extraordinaire, — que le directeur de la Santé fût un théoricien et un croyant du système cellulaire, il ne pourrait pas grand’chose pour en améliorer l’application. La prison qui lui est confiée contient en moyenne 1,000 détenus, 500 au quartier cellulaire, 500 au quartier commun, quand l’effectif ne s’élève pas au-delà. Tout son temps est absorbé par les questions d’administration générale que fait naître à chaque instant la garde et l’entretien d’un personnel aussi nombreux : correspondance avec la préfecture de police, rapports avec les entrepreneurs, maintien général du bon ordre et de la discipline. Nouer des relations personnelles avec les détenus n’est pas chose qu’on puisse lui demander. Ils lui sont expédiés par charretées. Ce n’est pas lui qui les reçoit à leur arrivée, ce sont les employés du greffe. Après leur inscription sur le registre d’écrou, c’est le gardien-chef qui les répartit dans les différens quartiers de la maison. Quant au directeur, il n’est appelé à les connaître personnellement que s’ils demandent à communiquer avec lui ou si leur détention donne lieu à quelque incident. Aucun règlement ne lui fait une obligation de s’enquérir de l’effet moral que la solitude produit sur chacun, et si une obligation de cette nature était de celles qui peuvent être inscrit’ s dans un règlement, il lui serait matériellement impossible de s’en acquitter. A moins de circonstances exceptionnelles, il n’intervient guère dans la vie des détenus que pour les punir s’ils troublent la discipline, ou bien, au contraire, pour leur accorder quelque amélioration de régime si leur santé est affectée par la détention. D’une façon générale, les directeurs des prisons de la Seine sont très humains et enclins vis-à-vis des détenus à une douceur qui peut aller parfois jusqu’à la faiblesse ; mais pour eux tous, pour celui de la Santé comme pour les autres, les détenus ne sont et ne peuvent être généralement que des numéros.
Restent, si nous avons toujours présente à l’esprit la comparaison avec le régime des prisons hollandaises, les visites qu’ils peuvent recevoir de l’instituteur, des personnes charitables et de l’aumônier. D’instituteur, il n’y en a pas eu pendant longtemps à la prison de la Santé. On n’en a nommé un que depuis peu, et il serait assez naturel que, l’instruction étant obligatoire partout, elle le fût également dans la prison. Mais, en réalité, elle est donnée à ceux-là seulement qui la réclament et dans le quartier commun. L’instituteur ne donne pas de leçons individuelles dans les cellules. Quant aux personnes charitables, cela est plus simple encore : il n’y en a pas. On ne trouve pas attachée au quartier cellulaire