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qui faisait, avec le 17e léger, l’arrière-garde, de sortir, mais non pas indemne, de ce pas dangereux.

Ce premier succès enhardit d’autant plus le lieutenant d’Abd-el-Kader qu’il fut rejoint dans la nuit par le bataillon de Sidi-Mbarek et par une colonne de 1,200 à 1,500 cavaliers arabes. Il n’y eut guère qu’une escarmouche, le 3 avril au soir ; mais le lendemain, dès la pointe du jour, pendant que l’armée remontait vers le col, l’affaire s’engagea plus sérieuse, comme au 20 mai 1840. Heureusement le général Bugeaud s’entendait beaucoup mieux que le maréchal Valée à manier les troupes. Tournés par deux bataillons du 23e et du 53e, et menacés d’être pris à revers, les réguliers disparurent dans les ravins, et la cavalerie arabe, qui s’était avancée pour les soutenir, ne tarda pas à faire demi-tour. Au plus vif de ce combat, le général Changarnier fut atteint à l’épaule d’une blessure qui, d’abord jugée grave, ne l’empêcha pourtant pas de remonter à cheval et de continuer son service.

Le 6 avril, un second convoi fut conduit de Haouch-Mouzaïa à Médéa sans coup férir ; le gouverneur employa la journée du lendemain à visiter la place, où le 53e releva les zouaves, et le 8 avril, la colonne expéditionnaire, sous des torrens de pluie qui lui furent beaucoup plus désagréables que les balles kabyles, regagna Blida, d’où les différens corps rejoignirent pour une douzaine de jours leurs cantonnemens. Leurs pertes, un peu atténuées, n’auraient été, d’après les rapports officiels, que de vingt et un tués et de deux cent dix blessés.

A peine de retour à Alger, le gouverneur y reçut, le 10 avril, le duc de Nemours, appelé au commandement d’une division. Depuis plus d’un mois, il avait été précédé sur la terre d’Afrique par son frère le duc d’Aumale, qui venait de marcher, avec le grade de lieutenant-colonel, à la tête du 24e de ligne, à côté du colonel Gentil. « Je vous prierai, mon général, avait-il écrit au gouverneur, de ne m’épargner ni fatigues ni quoi que ce soit. Je suis jeune et robuste et, en vrai cadet de Gascogne, il faut que je gagne mes éperons. Je ne vous demande qu’une chose, c’est de ne pas oublier le régiment du duc d’Aumale quand il y aura des coups à recevoir et à donner. » — « Vous ne voulez pas être ménagé, mon prince ? Je n’en eus jamais la pensée, avait répondu le général Bugeaud ; je vous ferai votre juste part de fatigues et de dangers ; vous saurez faire vous-même votre part de gloire. » Et, de fait, cette petite expédition de dix jours, ce prologue d’une campagne plus longue dans un champ plus étendu, avait suffi pour mettre en relief les qualités à la fois brillantes et sérieuses du duc d’Aumale.

Un jeune officier du 24e, le lieutenant Ducrot, écrivait dans une