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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 octobre.

A mesure qu’on approche de la session nouvelle, on ne peut se dissimuler que les choses prennent une singulière tournure, que tout est trouble et confusion dans les esprits comme dans les faits, et que nous entrons dans une de ces phases où il faut s’attendre à de l’imprévu. On aurait beau se faire illusion, depuis quelques semaines surtout, les difficultés se pressent et s’enveniment, les passions s’irritent, les symptômes inquiétans se multiplient. Que se passera-t-il à la première rencontre entre le gouvernement et les partis dans les chambres? Tout se prépare peut-être pour des crises nouvelles, et, par une fatalité de plus, ces trois mois de vacances qui viennent de s’écouler, qui avaient d’abord assez bien commencé, finissent par d’étranges désordres dans les affaires morales, en même temps que par des menaces de conflits dans les affaires politiques de la France. Incidens pénibles pour la moralité publique, incohérences inévitables de parlement, c’est là pour l’instant le plus clair d’une situation peu faite, on en conviendra, pour inspirer quelque confiance au pays.

Rien, assurément, de plus triste que cette affaire, qui vient de mettre brusquement à nu de si étranges corruptions de mœurs, et qui, depuis quelques jours, semble prendre d’heure en heure des proportions plus inquiétantes. Tout n’est peut-être pas découvert encore, la justice poursuit son œuvre; on en sait du moins assez pour voir quelles singulières industries pullulent dans les bas-fonds d’une société troublée, comment aussi peuvent succomber aux plus misérables tentations des hommes qui sont censés avoir le sentiment de l’honneur. Que des intrigans vulgaires, des spéculateurs sans scrupule, des femmes de vie suspecte songent à profiter de quelques relations qu’ils se créent souvent par importunité, de quelques mots insignifians qu’ils surprennent,