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qu’à Beth-Séan, et dans la vallée du Jourdain. David et ses gens marchaient à l’arrière-garde avec Akis. La fortune, qui si souvent déjà l’avait servi et que, du reste, il secondait par une rouerie à toute épreuve, le sauva de cette rencontre, la plus dangereuse de toutes. Les chefs philistins, très sensément, il faut le dire, remontrèrent à Akis combien il était à craindre que David ne fit volte-face dans la bataille et n’opérât sa réconciliation avec son ancien maître, aux dépens de ses nouveaux alliés. David fut congédié et revint à Siklag en trois jours.

Une terrible surprise attendait ici David et ses gens. Profitant de leur absence, les Amalécites avaient fait une invasion dans le Négeb, pillant également les Judaïtes, les Calébites, les Philistins. Ils s’étaient emparés de Siklag et l’avaient brûlée. Les femmes et tout ce qui s’y trouvait tombèrent entre leurs mains; puis ils repartirent pour le désert. La désolation fut extrême. Les deux femmes de David, Ahinoam et Abigaïl, étaient captives. Les compagnons de David avaient perdu leurs fils et leurs filles. L’indiscipline se mit dans la troupe; on ne parlait pas de moins que de lapider David. Celui-ci résolut de se mettre à la poursuite des Amalécites; auparavant, cependant, il voulut consulter l’oracle. Il fit apporter l’éphod par le prêtre Abiatar et interrogea Iahvé en ces termes : « Poursuivrai-je cette bande ? L’atteindrai-je ? » Iahvé répondit : «Poursuis, tu atteindras, tu délivreras. » David partit avec ses six cents hommes. Deux cents s’arrêtèrent au torrent de Besor. Les quatre cents autres continuèrent.

Un Égyptien, esclave d’un Amalécite, qu’ils trouvèrent dans la campagne à moitié mort de faim, les renseigna et les conduisit au camp des Amalécites. Ils trouvèrent les pillards mangeant, buvant, dansant, se réjouissant de l’immense butin qu’ils avaient fait dans le pays des Philistins et de Juda. David massacra toute la bande; il ne s’échappa que les esclaves, qui s’emparèrent des chameaux et s’enfuirent. Les camarades de David recouvrèrent tout ce qu’ils avaient perdu. David retrouva ses deux femmes. On ramena de superbes troupeaux.

Une arrière-pensée, assez digne des gens sans aveu qui composaient la troupe de David, vint alors à l’esprit des bandits victorieux : c’est que les Philistins, les Judaïtes, les Calébites, viendraient réclamer leur bien ; qu’il faudrait au moins partager ce butin avec les traînards restés au Besor. En tête du convoi, on criait : « Ceci est le butin de David, » pour bien établir que tous ceux qui n’avaient pas fait partie de l’expédition avaient perdu leurs droits sur leur ancienne propriété, en d’autres termes que tout était devenu la propriété des Amalécites, puis celle des membres du petit corps