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d’Israël mais dont les institutions politiques et militaires étaient bien supérieures. A toutes les objections que faisaient les sages, partisans des vieilles idées, le peuple répondait : « Non il faut que nous ayons un roi, pour que nous soyons comme toutes les nations et que notre roi nous gouverne, et qu’il sorte à notre tête, et qu’il combatte nos guerres. »,

Le roi ou mélek, si ardemment demande, parce que, évidemment, les conditions du siècle le réclamaient, est, on le voit, le basileus des Grecs homériques. Le basileus, comme son nom l’indique, marche en tête du peuple, entraîne le peuple à la bataille, un bâton à la main ; voilà sa fonction, voilà son rôle. C’est le Herzog germaniaue 11 a fallu d’énormes transformations pour qu’une royauté née sous de telles auspices soit devenue une sorte de sacrement. Grâce à la Bible, on peut suivre d’âge en âge cette évolution singulière des idées d’Israël. A l’heure où nous sommes, le problème est tout profane et militaire : Israël veut exister comme nation. Chaque pas vers l’unité nationale est un pas vers la royauté. L’œuvre qu’avaient tentée vainement Gédéon, Abimélek Jephté, allait enfin être accomplie par un Benjaminite, médiocre d’esprit mais brave et fort, que les besoins du temps devaient élever au-dessus de ce que son mérite et son ambition semblaient comporter.

« Saül prit la royauté sur Israël, » dit le plus ancien texte relatif à ces événemens. On ne saurait nier cependant que Samuël n’ait pu avoir en ce grave événement, une paît décisive, non pour combattre l’établissement de la monarchie, selon la version plus tard accréditée par l’historien théocrate, mais, au contraire, pour y servir, comme nous le disent les textes les plus anciens. Selon ces textes, Samuël sur une révélation de Iahvé, aurait désigné le roi et l’aurait consacré. impossible de savoir, pour une aussi haute antiquité de telles choses avec précision. Saül avait, indépendamment de toute désignation prophétique, les qualités royales du temps. Il était l’homme accompli d’un âge simple, où la force corporelle passait pour le premier des dons.

C’était un héros antique, un grand et bel homme, très courageux, très robuste, de Gibéa en Benjamin. Les Benjaminites constituaient la sélection militaire d’Israël. Ils étaient vigoureux, adroits, rompus aux exercices du corps. Quand Saül était dans la foule des Benjaminites, il dépassait tout le monde de la hauteur des épaules. Des circonstances, sur lesquelles s’exerça la légende, le mirent en rapport avec Samuël. Saül fit, à ce qu’il parait, un séjour prolongé chez les prophètes, dansant et chantant avec eux. Il prit là des habitudes d’exaltation, qui, après l’avoir servi, devaient le perdre. Les gens de Gibéa, ses compatriotes, le voyant de la sorte