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et vous devez le suivre aussi bien que le sixième article de ce même mémoire que j’avais rétracté par ma lettre du 9e de ce mois.

Je compte que les ordres que je vous donne par cette dépêche vous mettront en état de finir, et vous ne devez pas douter de la satisfaction que j’ai de la bonne conduite que vous avez tenue dans cette négociation.

Je reçois encore par un courrier votre lettre datée du 18e de ce mois ; elle confirme ce que vous avez écrit par les précédentes de l’état de votre négociation et de la nécessité de finir, soit en acceptant les propositions du prince Eugène, soit en rompant les conférences. J’ai fait avertir l’électeur de Bavière de l’état où je me trouvais et de la résolution que j’avais prise de finir en acceptant son rétablissement pur et simple sans aucun dédommagement.

Il déclare qu’il n’acceptera jamais ces conditions, que plutôt que d’y souscrire, il cédera ses états à son fils, et qu’il se réduira lui-même à mener une vie privée. Mais je le crois trop raisonnable pour se porter à de pareilles extrémités. Enfin, ses représentations n’apportent aucun changement au parti que j’ai pris[1].

Ainsi le seul ordre que j’ajouterai à ceux que je vous ai donnés est de profiter de l’avis secret que vous avez reçu par le baron d’Hundheïm, et soit que l’insinuation qu’il vous a faite vienne du pur mouvement de l’électeur palatin, soit qu’elle soit concertée avec le prince Eugène, comme il y a beaucoup de sujets de le croire, mon intention est que vous demandiez le bailliage de Germesheim jusqu’à la rivière de la Queich suivant ce mémoire que vous m’envoyez, c’est-à-dire avec tous les droits et prétentions que l’électeur Palatin a en-deçà de cette rivière, même sur les bailliages de Gutenberg et de la Petite-Pierre, non-seulement pour la souveraineté, mais encore pour le domaine utile, et en toute propriété.

Quoique je ne doute pas que vous n’obteniez encore cette condition, après l’avis qui vous a été donné, mon intention n’est pas cependant que, si elle vous était refusée, cette considération puisse rompre la paix que je compte désormais bien avancée.


Louis XIV, on le voit, ne doutait pas qu’une offre aussi sérieuse que celle d’un territoire d’empire n’eût été concertée avec le prince

  1. Pour ramener l’électeur à des idées plus « raisonnables, » le roi sut prendre le bon moyen. M. de Courcy a retrouvé aux archives des affaires étrangères et publié (Coalition de 1701, II, 161) une correspondance entre Torcy et Monasterol de laquelle il résulte que Louis XIV fit offrir à Max-Emmanuel 2 millions une fois payés, en dehors de ses subsides réguliers, et fit retirer les pierreries et vaisselles d’or qu’il avait mises en gage en Hollande. L’électeur accepta ce « dédommagement » et ne fit plus d’opposition au traité.