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avait-il donc moins calomnié, ou d’une autre manière, le bourgeois dans Pot-Bouille, et l’ouvrier dans l’Assommoir ? Un autre lui reprochait, en nous décrivant un accouchement dans la Terre, — en quels termes, je n’en veux rien dire ! — d’avoir essayé d’y salir jusqu’à la maternité ; mais dans Pot-Bouille, il y a déjà des années, M. Zola n’avait-il point commencé ? Quant à ceux qui ne lui reprochent que ses obscénités, il faut vraiment qu’ils aient oublié dans quel temps ils vivent, et les autres romans qu’ils lisent, et à quelle sorte d’histoires, sur leurs vieux jours, ils s’acharnent encore eux-mêmes. La Terre, du moins, aura-t-elle peut-être cette utilité de leur ouvrir les yeux ? En retirant sa faveur et son admiration à l’auteur des Rougon-Macquart le public les retirera-t-il à tant d’autres qui ne réussissent qu’aux mêmes conditions, par les mêmes moyens, et avec un peu plus d’habileté seulement que M. Zola ? Et comprendra-t-on enfin que, si l’on ne le fait pas, M. Zola, qui comptera toujours sur les mêmes lecteurs, pour se les. attacher encore davantage, ne se souciera dans un prochain roman que de faire plus fort que lui-même ? C’est ce que je souhaite à mes contemporains, aisément consolé à ce prix de la banqueroute du naturalisme, ou plutôt, et naturaliste moi-même, trop heureux alors de la catastrophe, puisque, indépendamment de beaucoup d’autres choses, s’il en est une dont manquent surtout les romans de M. Zola, c’est de valeur documentaire, de naturel et de vérité, de vie et de variété.


F. BRUNETIÈRE.