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il est vrai, déclarent ces incrédules, mais il vaudrait mieux qu’elles fussent moins nombreuses et plus concluantes. Les anomalies, les singularités sont par trop considérables. Vous affirmez qu’elles doivent s’atténuer, puis disparaître au-delà d’une certaine limite. Qui vous autorise à le croire ? Les sondages profonds ne fournissent pas de chiffres moins discordans que ceux qui se sont arrêtés plus haut. En revanche, il semble à peu près prouvé que le degré géothermique augmente avec la profondeur, ce qui veut dire que l’accroissement de température, d’abord assez rapide dans le voisinage de la surface, se ralentit peu à peu. Pourquoi cette même température, loin de croître indéfiniment, ne convergerait-elle pas vers une limite fixe, indépendante du niveau, mais d’ailleurs plus ou moins reculée ? » Quand on exécuta le grand forage de Sperenberg, Dunker, qui présidait aux expériences, voulut en exprimer le résultat au moyen d’une formule mathématique d’interpolation. Suivant cette règle empirique, la température atteindrait 51 degrés au bout d’une épaisseur de 1,600 mètres, et au-delà il y aurait diminution. Les adversaires du feu central triomphèrent, et l’un d’eux, M. Mohr, écrivit : « Cette vieille théorie a reçu son coup de grâce. » Malheureusement, si l’on continue d’appliquer la formule, on s’aperçoit qu’à 3 kilomètres 1/2 sous terre règne la température de la glace fondante ; Ounker avait, bien malgré lui, inventé l’hypothèse plus que paradoxale du froid central, et ce seul fait suffit pour montrer quel cas l’on doit faire de ces interprétations fantaisistes. Il y a quelques mois, les journaux ont annoncé que dans les mines de Lansell, près de Sandhurst (Australie), le thermomètre avait enfin accusé une légère dépression vers 536 mètres ; mais ce phénomène, en admettant même que la nouvelle soit exacte, est encore isolé.

En définitive, tout partisan du feu central croit aussi à la liquidité de l’ensemble du globe terrestre, à la réserve d’une couche externe relativement insignifiante, et tout argument qui milite contre l’une de ces deux doctrines s’attaque par cela même à l’autre. Hopkins, en étudiant la précession des équinoxes, dans l’hypothèse d’une sphère entièrement solide, trouve un résultat parfaitement concordant avec ce que les observations astronomiques nous apprennent. Sir W. Thomson a invoqué le phénomène des marées ; l’action combinée de la lune et du soleil attire les eaux de la mer et déforme la surface de l’océan ; si la terre était constituée d’une matière non rigide, sa croûte, obéissant à la même attraction, aurait, elle aussi, ses marées, et, en définitive, les deux effets se masqueraient mutuellement, et le résultat apparent serait nul ou à peu près. Comme cependant les marées existent et sont