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hospitalière qu’ont fondée, que possèdent et qu’entretiennent MM. Edouard et Arthur de Rothschild, en mémoire de leur père Nathaniel. C’est une propriété particulière, un établissement privé exclusivement attribué aux enfans israélites et situé non loin du grand hôpital bâti par l’assistance publique du département de la Seine. En vérité, l’on ne peut mieux faire, et la petite communauté juive, servie, guidée par des familles dont la bienfaisance est opulente, semble, comme un état dans l’état, s’être constituée en gouvernement indépendant et charitable pour porter plus efficacement secours aux infortunes dont son peuple est frappé. La richesse rend tout facile, certes, mais à la condition qu’elle ne se ménage pas et qu’elle donne spontanément la dîme, — le maasser, — aux malheureux.

Les services que l’hôpital israélite a rendus et rendra seront appréciés par ce fait que depuis sa création, — 5 juillet 1852, — jusqu’à ce jour, — 1er mai 1887, — il a reçu, hébergé, soigné 31,956 malades. On ne se contente pas de les admettre dans les salles, on donne des consultations gratuites où toute communion est admise, sans distinction d’origine. Les gens du quartier en profitent avec d’autant plus d’empressement que les médicamens prescrits, préparés à la pharmacie abondamment fournie de la maison, ne leur coûtent pas plus cher que la consultation. Les consultans sont si nombreux, ils encombrent tellement les salles qui leur sont réservées, que l’on s’est vu contraint, pour sauvegarder le service de l’hôpital proprement dit, de les limiter au chiffre quotidien de quarante. Cette organisation est postérieure à celle de l’hôpital et ne date en réalité que de 1858. Depuis cette époque, 205,110 consultations ont été données ; les israélites, fort disséminés dans le XIIe arrondissement, n’en ont profité que dans la proportion de 3 pour 100. Une fois le service de l’hôpital assuré et celui des consultations terminé, la besogne des internes n’a pas pris fin, car ils ont reçu de leurs devanciers et accepté la charge d’aller dans ces quartiers populeux visiter les malades indigens qui répugnent à entrer dans les salles hospitalières ou qui n’y ont point été admis faute de place. Dans ce cas, c’est encore la pharmacie de l’hôpital Picpus qui fournit les médicamens. Si l’hôpital est exclusivement destiné aux israélites, il ne s’ensuit pas qu’il reste obstinément fermé aux malades des autres religions ou de la libre pensée. Tout individu victime d’un accident sur la voie publique est accueilli : jamais on ne se refuse à ce que le langage technique appelle l’urgence ; le nombre des malades reçus de la sorte représente 4 pour 100 du total général. On est très libéral et généreux à leur égard. Sur leur demande ou sur celle de leurs