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Hippone : ils étaient recueillis par des secrétaires, répandus dans toute l’Afrique, et, grâce à l’immense réputation de l’orateur et à la passion qu’on avait alors pour les luttes religieuses, tout le monde les dévorait. Les donatistes, quand ils étaient de bonne foi, se sentaient touchés par la modération de saint Augustin autant que par la vigueur de sa dialectique. Les furieux, au contraire, s’emportaient, et, comme il arrive, n’ayant pas de bonne raison à donner, ils répondaient par des injures. C’était précisément ce que souhaitait Augustin : il profitait de leur ton d’assurance hautaine pour les provoquer à quelque lutte publique. S’ils avaient l’imprudence d’accepter, on appelait des sténographes (notarii) pour recueillir toutes les paroles, et le débat commençait, au milieu d’une foule frémissante, qui interrompait souvent les discuteurs par ses acclamations ou par ses murmures. Il était rare qu’Augustin n’eût pas l’avantage, et que, parmi les esprits qui n’étaient pas prévenus, il ne fit pas quelques conquêtes.

C’est ce qui lui donna l’idée de demander une réunion générale des évêques des deux partis. Elle eut lieu à Carthage, en présence des 279 évêques donatistes et de 286 catholiques, et fut présidée par un des grands fonctionnaires de l’empire, le comte Marcellinus, que l’empereur avait chargé de le représenter. Cette conférence de Carthage est un des grands événemens de l’histoire de l’église au IVe siècle et de la vie de saint Augustin. On voit bien qu’il en sentait toute l’importance un ton avec lequel il demande aux fidèles, dans un sermon prononcé quelques jours avant l’ouverture des débats, de l’aider de leurs prières. « Et vous, leur dit-il, qu’avez-vous à faire en cette rencontre ? Ce qui produira peut-être les fruits les plus abondans. Nous parlerons, nous disputerons pour vous ; vous autres, priez pour