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les eaux souterraines.


principale consiste à trouver des parois capables de résister. De l’eau ayant été placée dans un tube de verre, qui fut ensuite fermé à la lampe, on introduisit le tube dans un second tube en fer, à parois très épaisses, qui fut lui-même, non sans peine, clos à la forge. Afin de contrebalancer dans l’intérieur du tube de verre la tension de la vapeur d’eau qui pouvait le faire éclater, on avait eu soin de verser de l’eau extérieurement à ce tube, entre ses parois et celles du tube de fer. Les appareils furent placés sur le dôme d’un four d’usine à gaz, en contact avec une maçonnerie au rouge sombre, dans une couche épaisse de sable où ils séjournèrent pendant plusieurs semaines. Dans ces conditions, les explosions peuvent être d’une violence extrême : les tubes les plus résistans sont projetés en l’air, en se déchirant avec un bruit comparable à celui d’un coup de canon. Il n’a donc pas été possible de multiplier les épreuves, comme il eût été désirable. Cependant, celles qui ont été faites ont suffi pour dévoiler des faits bien différens de ceux que nous avaient appris les laboratoires, dans les conditions ordinaires.

En effet, l’eau réagit alors très énergiquement sur le verre, qui bientôt subit une transformation complète, dans son aspect aussi bien que dans sa composition. Il se trouva remplacé par une masse blanche, tout à fait opaque, ressemblant à de la terre à porcelaine, avec des gonflemens et des ampoules, dus à un ramollissement. Aux dépens d’une partie de la substance se développèrent d’innombrables cristaux très petits, incolores, d’une limpidité parfaite comme le cristal de roche, auquel ils sont identiques, puisqu’ils en possèdent exactement les formes, jusqu’aux petites facettes dites plagièdres, bien connues dans certains gisemens des Alpes et du Brésil. Ces cristaux de quartz artificiel apparaissent tantôt isolés, tantôt groupés en géodes qu’il serait impossible de distinguer, à la dimension près, de celles de la nature.

Un autre produit des mêmes expériences ne mérite pas moins d’attention; c’est le pyroxène qui s’offre en petits cristaux verts, brillans et transparens, véritables fac-similés de ceux des Alpes. Pour la première fois, on voyait un silicate anhydre se produire par l’action de l’eau[1].

Mentionnons encore un témoignage d’un autre genre de la puissance qu’acquiert l’eau dans de telles conditions : du bois de sapin a été converti en une substance d’un noir très éclatant et dure comme l’anthracite, dont elle a l’aspect, ne consistant plus qu’en charbon associé à de faibles quantités de matières volatiles. Sa

  1. Plus récemment, à l’aide de procédés analogues, le feldspath a été imité par MM. Friedel et Sarrasin.