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par l’eau? Comme le corps humain, la terre renferme nombre d’humeurs, dont quelques-unes se durcissent à l’époque de la maturité; d’où les terres métalliques et les substances pierreuses, qui ne sont que des liquides pétrifiés. »

Les hypothèses, relatives à la nature des substances minérales, qui ont eu cours jusqu’au siècle dernier, se rapprochent de cette doctrine. Bernard Palissy, l’un des esprits les plus pénétrans de son époque, a écrit : « Toutes les matières minérales que tu appelles corps morts furent aussi créées, comme les végétatives, et se travaillent à produire semences pour en engendrer d’autres. Le cristal n’est pas tellement mort qu’il ne luy soit donné de se sçavoir séparer des autres eaux et au milieu d’icelles se former par angles et pointes de diamans. Aussi, les matières minérales ne sont pas tellement inertes qu’elles n’enfantent et produisent de degré en degré choses plus excellentes. Ces matières minérales sont entremeslées et inconnues parmy les eaux, en la matrice de la terre, ainsi que toute humaine créature et brutale est engendrée sous espèce d’eau. Les matières des métaux sont en telle sorte cachées qu’il est impossible à l’homme de les connoistre auparavant qu’elles soyent congelées, non plus qu’une eau en laquelle l’on aurait fait dissoudre du sel, nul ne sçaurait dire qu’elle fust salée, sans la taster à la langue. » Puis, répondant aux alchimistes qui, dans leurs expériences, recouraient aux températures les plus élevées des fourneaux alors connus, Palissy ajoute : « Quand tu auras bien examiné toutes choses par les effets du feu, tu trouveras mon dire véritable, que le commencement et origine de toutes choses naturelles est eau. » On ne saurait raisonner d’une manière plus ingénieuse sur une idée assurément imaginaire, mais qui ne pouvait être guère plus solide, à une époque où, la chimie n’ayant pas encore revêtu un caractère scientifique, la nature des substances dont on cherchait à deviner l’origine demeurait à peu près inconnue.

Frappés de l’admirable régularité des révolutions des astres, certains esprits furent conduits, par une généralisation mystique, à en tirer des conséquences applicables aux phénomènes de notre propre planète. Suivant une doctrine qui remonte aux Chaldéens, et que l’on retrouve aussi chez les Égyptiens, des influences sidérales contribuent à la maturation, c’est-à-dire à la transformation souterraine des substances minérales. On supposait des relations mystérieuses entre les corps célestes de notre système solaire et les métaux dont l’éclat présente quelque ressemblance avec la couleur de ces astres. Conformément au principe des semblables, l’or devait correspondre au soleil, l’argent à la lune, le fer à Mars, le