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alimentation. L’inépuisable abondance de cette nappe intérieure trouve d’ailleurs là une application agricole, peut-être unique jusqu’à présent : l’eau qu’on en extrait, à l’aide de puits peu profonds nommés fontanili, est éminemment propre à l’irrigation, à cause de sa température à peu près constante et très supérieure en hiver à celle de l’air ambiant ; en la forçant à s’écouler sans cesse en une couche : mince, malgré un climat aussi froid en hiver que celui du nord de la France., on coupe de l’herbe en janvier comme, en été. Ces fontaines artificielles d’eau réchauffée dans le sous-sol sont au nombre de plus d’un millier, et occupent une zone d’environ 200 kilomètres de longueur, depuis le Tessin jusqu’à Vérone.

Toutes les roches qui, à raison de leurs fissures, se laissent facilement pénétrer par l’eau, peuvent aussi receler une nappe phréatique. A Paris et aux environs, celle des alluvions se prolonge dans les bancs calcaires du terrain tertiaire voisin. Avant le développement de la nouvelle distribution d’eau, cette nappe fournissait presque toutes les maisons par des puits aujourd’hui abandonnés : on n’en comptait pas moins de trente mille, quand on les a recensés au moment du siège. La craie blanche, coupée par de nombreuses fentes ou diaclases, emmagasine aussi de l’eau, que les populations des plateaux secs de la Champagne pouilleuse utilisent au moyen de puits souvent très profonds. De même que la nappe du gravier, elle se déverse naturellement en sources dans les vallons on les dépressions dont le fond est assez bas pour l’atteindre, par exemple, au-dessous du camp de Châlons, à Mourmelon. Les sources de la Vanne, dont les principales sont amenées à Paris après un trajet de 130 kilomètres, prennent naissance dans les mêmes conditions. Le fait se reproduit dans une foule d’autres localités où le sol est également constitué par des couches fissurées.

L’eau de ces nappes phréatiques ne reste pas stagnante ; elle est animée d’un mouvement lent et continu. Parmi les faits qui le prouvent, on peut citer la propagation dans le sous-sol d’impuretés telles que le goudron, avec une même direction, sur plusieurs centaines de mètres et dans une série de puits, dont l’alignement marquait le sens du courant. Ce : mouvement est dû à une pente générale de la nappe : aux abords de l’Arc de l’Étoile, son niveau est plus élevé d’environ 8 mètres que celui de la Seine, où elle s’écoule comme dans un canal d’assèchement. Ce sont, en quelque sorte, des rivières intérieures, mais qui se meuvent avec une très faible vitesse.

Dans les massifs des volcans, les déjections scoriacées et les coulées de laves, avec leurs cavités de toutes dimensions, offrent non moins de facilité aux infiltrations. Les eaux pluviales y pénètrent et reparaissent plus bas. Parmi les coulées des cinquante volcans