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Dans ces lis qu’elle incline on ne discerne plus
Leurs lentes flexions des plus chastes saluts,
Et pourrait-on jurer qu’il ne tremble personne
Dans le feuillage ému de ce bois qui frissonne ?
Ah ! quelle aménité dans la communion
De l’âme et du zéphir, du cœur et du rayon !

STELLA.


Nous sommes seuls, la terre est très loin, goûte encore
Des mauvais jours vécus la fuite à l’infini ;
Que l’oubli lentement un par un les dévore,
Et tout entier te rende à ce séjour béni !

FAUSTUS.


O Stella, mon amie, après tant de vacarmes :
Blasphèmes, cris, sanglots, soupirs, clameurs.
Appels aigus et confuses rumeurs,
Voix d’hommes, bruits d’outils, fracas de chars et d’armes,

Que ce silence est doux, ineffablement doux !
Qu’il est suave à l’âme, ce silence
Où, clair et pur, dans l’air serein s’élance
Le chant de ces oiseaux qui n’ont pas peur de nous !

Vers nous de tous côtés ils arrivent par bandes.
Regarde-les près de nous voltiger.
Ou balancer en éventail léger
Leurs ailes, sur nos fronts ouvertes toutes grandes.

Écoutons-les. Jadis l’hymne du rossignol,
Si renommé sur notre ancienne terre.
Des nuits d’alors enchantait le mystère
Sans jamais rendre au ciel l’âme enchaînée au sol.

Te souvient-il du parc où nous errions si tristes ?
Dans un sentier tout jonché de lilas
La solitude alanguissait nos pas.
Le crépuscule aux fleurs mêlait ses améthystes.

Où sombrait le soleil, dans un lointain pays.
Nos cœurs rêvaient une patrie absente,
Quand une note au ciel retentissante
Comme un trait d’or soudain s’éleva du taillis.