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pareille légitimation pour les annexions qu’il lui convenait de faire; sur quoi lord Palmerston fit observer à son interlocuteur qu’il ne fallait pas donner à cette discussion plus de portée qu’elle n’en avait. « Votre gouvernement, ajouta-t-il encore une fois, peut être convaincu que la possession d’Alger ne deviendra jamais entre lui et le ministère dont je fais partie l’occasion ou même le prétexte d’un conflit sérieux. » Un débat assez vif sur la question d’Alger venait d’avoir lieu à la chambre des communes, et c’était dans la crainte qu’il ne se renouvelât que lord Palmerston avait voulu se prémunir contre les attaques de l’opposition par sa note officielle ; telle était du moins l’opinion du général Sébastiani à propos d’un incident brusquement survenu, disparu brusquement, comme un météore diplomatique.


IV.

Si, en dépit des résistances intérieures et extérieures, la domination française marchait à grands pas dans le beylik de Constantine, la plus étendue, la plus peuplée, la plus riche des trois provinces, elle ne cheminait pas aussi vite autour d’Alger. Depuis près de dix mois que le traité de la Tafna lui avait assigné ses limites, elle ne les avait pas encore atteintes. A l’expédition de Constantine et à ses suites qui avaient dû retarder l’occupation de la Métidja, il faut ajouter les longues méditations du maréchal Valée, ses habitudes de méthodique lenteur. Enfin, ses résolutions définitivement arrêtées, il les fit exécuter dans les derniers jours du mois de mars 1838. Le 26, le colonel de La Moricière prit possession de Koléa et de son territoire; mais, pour ménager les scrupules religieux des habitans, l’accès de la ville sainte fut rigoureusement interdit aux Européens ; sur un plateau qui la domine à l’ouest, un camp permanent reçut les trois bataillons de zouaves, un bataillon du 63e, un peloton de chasseurs d’Afrique et quatre pièces d’artillerie. Le lendemain, à l’autre extrémité de la plaine, un bataillon du 2e léger, deux bataillons de la légion étrangère, un détachement de cavalerie et quatre bouches à feu prenaient position sur le haut Hamiz et entreprenaient aussitôt la construction de deux camps retranchés, l’un à Kara-Moustafa, sur la rive gauche du Boudouaou ; l’autre, à deux lieues en arrière, au Fondouk ; une route de 23 kilométres devait les reliera la Maison-Carrée. Enfin, le 3 mai, le gouverneur, à la tête d’une colonne de quatre mille hommes, se présenta devant Blida; le hakem, le caïd des Beni-Sala, les députés des notables, venus à sa rencontre, lui firent hommage. De même qu’à Koléa, l’entrée de la ville fut provisoirement interdite aux Européens. Deux camps, l’un dit supérieur, au nord-ouest, l’autre dit