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sant des souscriptions pour l’enseignement religieux. Voilà qui est singulier, en effet ! Depuis des années on gaspille la fortune publique dans une guerre contre les sentimens d’une partie du pays. On pressure les contribuables, on surcharge les communes, les départemens aussi bien que l’état. On ne se contente pas de prodiguer l’argent, on menace de révocation de petits fonctionnaires, de modestes gendarmes qui n’enverraient pas leurs enfans à l’école officielle. Dernièrement encore, on trouvait tout simple de demander à M. le ministre de la marine de fermer l’école navale à des jeunes gens qui vont chercher à Jersey un enseignement choisi par leurs familles. On épuise tous les moyens, l’intimidation, la compression, les menaces arbitraires, les captations, les ressources du trésor, — puis on se tourne d’un air vainqueur vers ceux qui n’ont que leur bonne volonté, leurs propres ressources pour défendre la liberté de leurs croyances et on leur dit d’un ton plaisantin : Votre zèle faiblit, vos souscriptions diminuent, décidément vos écoles ne peuvent rivaliser avec les nôtres ! C’est ce qui peut s’appeler ajouter une ironie de mauvais goût à la brutalité d’une des plus audacieuses entreprises sur la conscience d’un pays. M. le rapporteur de la commission et ses amis, qui ont l’humeur si joviale, se croient peut-être de grands novateurs, de grands champions du progrès : ils ne s’aperçoivent pas que, partout ce qu’ils font, ils ne sont que les plagiaires des plus vieux despoiismes, que, pour le moment, ce qu’ils appellent leur succès, se réduit à avoir mis la république en guerre avec le sentiment religieux et tous les seniimens libéraux de la France.

Oui, sans doute, cette tardive discussion du budget, si décousue qu’elle suit, aura eu du moins ce mérite de mettre une fois de plus en relie ! les deux traits les plus caractéristiques de la politique rf publiv

ine : le mépris de toute règle, de toute garantie, le guut de Tarbîtraire 

dans les aiiaires publiques, et cette passion de secte qui se sert de romnipoieuce de l’état pour vit)lenier les croNances. C’est bien là le fond du SNStème qui a régné depuis quelques années, c’est la politi lue qu’on a vue à l’œuvre. Et avec cela à quoi est-on arrivé ? Le sstème a eu le temps de porter ses fruits. On a beau se donner des airs V’Ctorieux et se reprendre à l’optimisme toutes les fois qu’une élection nouvelle dans le Nord ou dans la Manche ressemble à un succès républicain. Les résultats réels, positifs, d’une fausse politique ne sont pas moins ce qu’ils devaient être dans tous les ordres d’affaires et d’intérêts. Matériellement, on a gaspillé les plus puissantes finances ; on a épuisé ou compromis la fortune publique et le crédit par les entreprises aventureuses, par les excès sompiuaires d’écoles inutiles, par la multiplicité des travaux engagés sans prévoyance et sans mesure, par la prodigalité des dépenses incessamment accrues dans un intérêt de domination et de fausse popularité. On n’a rien prévu, rien cal-