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au Stock-Exchange, nouvelles transmises par la poste, toutes communications télégraphiques étant interrompues, présentent cette liquidation comme très laborieuse. La fermeté des places de Vienne et de Berlin a servi de correctif à l’impression qui pouvait résulter pour notre place des embarras du Stock-Exchange.

Si l’on se reporte à la cote des derniers jours de l’année précédente, on est frappé de l’importance et de l’étendue des changemens que l’année 1886 a amenés dans les prix des valeurs mobilières. Il y a un an, la situation politique générale semblait contenir plus d’encouragemens à l’optimisme que l’état actuel des choses. Nous étions en pleine crise ministérielle ; mais un débat solennel venait de fixer la politique coloniale ; M. Grévy était réélu pour sept ans président de la république, et M. de Freycinet procédait à la formation d’un cabinet de concentration républicaine auquel ses amis prédisaient volontiers une longue durée. Le Tonkin était définitivement pacifié ; la guerre entre la Serbie et la Bulgarie venait de prendre fin. Aujourd’hui nous sortons à peine d’une nouvelle crise ministérielle, et personne n’ose parler de la durée du cabinet qui en est sorti ; nous nous trouvons en plein gâchis budgétaire : la question bulgare est moins résolue que jamais, et toute l’Europe retentit du bruit des armemens.

Cette différence remarquable dans la situation politique se reflète exactement dans la comparaison des tendances du marché financier aux deux époques. A la fin de 1885, les cours des rentes et des valeurs étaient encore relativement bas ; la spéculation haussière avait un argument irrésistible et un appui précieux dans le bon marché de l’argent. On cotait du déport ou un report insignifiant sur les fonds publics. On avait confiance dans la possibilité d’une amélioration générale, bien justifiée après une stagnation si prolongée. Aujourd’hui il ne saurait être question, au moins pour l’instant, de bon marché extrême des capitaux, les reports élevés ont fait place au déport, il y a une liquidation laborieuse à franchir, et le lendemain apparaît incertain. Enfin la hausse attendue, espérée il y a un an, s’est produite, les valeurs ont pour la plupart très largement progressé, la rente 3 pour 100 est de deux points plus haut qu’il y a douze mois.

Parmi les fonds d’états étrangers quelques-uns ont fait, sur le chemin de la hausse, des bonds prodigieux. L’Extérieure, sous le gouvernement de la régente, a été portée de 55 à 66, amélioration extraordinaire de crédit, due en partie à de grands et intelligens efforts de spéculation, mais pour une bonne paît aussi à la transformation qui s’est opérée dans les dispositions des partis politiques de la péninsule, et à la force du sentiment dynastique dans toute l’étendue du pays. Le 3 pour 100 portugais avait également attiré l’attention de spéculateurs français et allemands par le bas prix auquel il se tenait depuis