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tant redouté a fait prélever jusqu’ici de 8 à 10 millions par semaine. Ce n’est pas à l’aide de retraits semblables que le marché pourra être sérieusement troublé.

On a vu quel progrès avaient fait cette semaine les deux rentes espagnole et portugaise, il y a une spéculation considérable engagée sur ces deux fonds et visant l’admission de la première à la cote de Berlin et de la seconde à la cote de Francfort. Le marché du Portugais est en outre travaillé en vue du classement des titres du dernier emprunt.

L’organe officiel du Crédit foncier annonce que les bénéfices de l’établissement, en 1886, permettraient de porter le dividende à 63 francs, mais que, dans une intention de sage prévoyance, on ne répartira que 60 francs et que le solde, soit 961,000 francs, sera porté au compte des provisions pour risques en cours.

On annonce, pour le commencement du mois prochain, une émission d’obligations des Chemins autrichiens, sous les auspices de la Banque de Paris. Cette éventualité n’est pas étrangère à la reprise très vive dont les actions des deux compagnies ont eu le bénéfice.

La réponse des primes, qui vient d’avoir lieu, laisse nos fonds publics et la plus grande partie des valeurs aux cours les plus élevés atteints depuis la reprise. Il y a toute raison de penser que la liquidation se fera dans les prix actuels, sauf événement du côté de la Bulgarie, et que les taux de report ne s’élèveront pas sensiblement. Pour qu’il en fût d’autre sorte, il faudrait que les acheteurs eussent en majorité commis l’imprudence de ne point se pourvoir à l’avance et sans attendre le jour même de la liquidation.

Un des traits caractéristiques et peut-être l’un des moins satisfaisans du mouvement de hausse que le mois d’octobre lègue au mois de novembre est la part manifestement peu importante qu’y a prise le public, le vrai public de l’épargne. On a escompté la reprise des affaires, que chacun voyait se dessiner; il en résulte que cette reprise apparaît jusqu’à présent avec un caractère un peu artificiel. Bien des valeurs cotées très bas et entièrement négligées jusqu’alors ont obtenu rapidement de très belles plus-values. Ce n’est assurément pas l’effort de l’épargne qui a produit ce résultat. Il serait bon qu’un temps d’arrêt rendît les cours nouveaux familiers aux petits capitalistes et surtout que les sociétés dont les titres ont monté prissent la peine de justifier au printemps prochain par l’exposé d’une situation réellement améliorée les changemens heureux survenus dans la cote de tout ce groupe de valeurs.


Le directeur gérant : C. BULOZ.