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LE
RÉGIME DU PROTECTORAT
EN TUNISIE

La France a fait en Tunisie, dans ces quatre dernières années, une importante et laborieuse expérience dont le succès pouvait paraître chanceux et ne peut plus être contesté. Des prophètes de malheur avaient bruyamment annoncé que sa nouvelle acquisition lui procurerait peu de profit et beaucoup d’embarras, qu’elle y dépenserait en vain beaucoup d’hommes, beaucoup d’argent, qu’elle y passerait son temps à étouffer dans le sang des insurrections sans cesse renaissantes, qu’après s’être exposée à de fâcheux démêlés avec la Turquie et avoir essuyé plus d’un affront, elle en serait peut-être réduite à évacuer Tunis, en reconnaissant la vanité de son effort. Les prophètes s’étaient trompés, les choses ont tourné autrement qu’ils ne le pensaient, grâce à la méthode nouvelle de gouvernement adoptée dans la régence. On a eu la sagesse de ne point l’annexer, on s’est contenté de la soumettre au régime du protectorat, et tout est devenu plus facile. Aussi cette méthode est-elle aujourd’hui en faveur. On entreprend de la pratiquer dans nos possessions d’Indo-Chine et à Madagascar; puissent les hommes distingués à qui on a confié cette délicate mission avoir la main aussi heureuse que M. Cambon!

Le régime du protectorat est une méthode de gouvernement indirect. Le protecteur ne substitue pas violemment son action à celle du protégé; il le dirige, il le conseille, après s’être assuré les moyens de