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Dieu très-haut de la part de notre bon maître, que Dieu le raffermisse et lui donne la victoire !

Ensuite notre maître le prince des tolba, détenteur de toutes les faveurs et dispensateur de toutes les nobles vertus, vous ordonne de faire parvenir le présent écrit aux seigneuries généreuses, soutenues par la religion musulmane, voyageant en votre compagnie, c’est-à-dire venues d’Alger avec vous.

Annoncez-leur que notre bienheureuse armée viendra camper dans la journée de samedi, s’il plaît à Dieu, sur les bords de l’Oued-Djouhar[1], au milieu des populations des Beni-Bairout, des Beni-Beki et des Beni- Far[2].

Nous leur avons imposé, pour la subsistance de notre armée protégée de Dieu, une contribution incalculable et sans limites en dehors de la contribution frappée en faveur de Notre Seigneur, que Dieu le rende victorieux, etc.

Ordonnez-leur l’obéissance et la soumission, afin qu’ils nous envoient mille étalons de la race chevaline, que montent les moustiques sellés avec des écorces de glands; — d’envoyer également mille porcs bien gras pour la suite du sultan.

Soyez plein de générosité à l’égard du porteur de la présente, au point qu’il ne puisse pas porter la charge que vous lui donnerez. Envoyez avec lui un cavalier d’escorte pour qu’il nous arrive en sécurité, à cause du grand nombre de coupeurs de route dans le pays des Reribia, et des désordres auxquels se livrent les populations de Kàab el- R’ouzal[3].

Il ne faut point qu’il y. ait du retard dans l’envoi de ces offrandes.

Salut! écrit dans le courant du mois de Leben[4], l’an du sucre et du thé et de. Ce qui leur ressemble.

S’ils ne se conforment point à nos ordres, nous ferons marcher contre eux les tribus des moustiques, qui ne les laisseront en repos que lorsqu’ils auront donné ce que nous avons mentionné dans notre lettre.

Salut. L’an 1622.

Cette belle missive portait, en guise de signature, un cachet en tout semblable à celui de l’empereur.

J’étais assez surpris que, dans un pays où l’autorité souveraine est environnée d’un véritable prestige religieux, où d’ailleurs elle

  1. La rivière des Perles, l’Oued-Fès.
  2. C’est-à-dire des enfans des puces, des enfans des punaises, et des enfans des souris.
  3. La Reribia, de même que le Kâab el R’ouzal sont des gâteaux. Le premier est rond, fondant, au sucre, à la farine et au beurre. Le second est un petit pâté plein de noix au sucre.
  4. Le leben est du fait aigri.