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engagés, dont 193 millions pour les ports, 249 millions pour les canaux et 139 pour la canalisation des rivières. Quant aux écoles et aux lycées, la prodigalité a dépassé toutes les bornes. Les embarras du trésor étaient déjà sérieux, lorsque M. Jules Ferry, après avoir reconnu qu’il avait été dépensé plus d’un demi-milliard, déclarait, dans un discours demeuré célèbre, que le minimum de la dépense encore à faire dépassait 700 millions. La loi du 2 août 1881, date caractéristique, augmentait la dotation de la caisse des écoles de 100 millions, qui devaient être fournis en six années, à partir de 1882, moitié par le budget ordinaire et moitié par l’emprunt: mais, dès la première année, les 100 millions étaient entièrement engagés par les promesses faites aux communes, pendant les élections générales ; et il devenait indispensable d’anticiper le paiement-des dernières annuités. C’est ainsi que la loi du 20 mars 1883 a appliqué aux besoins de l’exercice 1883 l’annuité qui n’était payable qu’en 1887; et il fallut appliquer à l’exercice 1884 les annuités destinées aux années 1885 et 1886. On se trouva donc fort dépourvu quand il fallut doter 1885, et, comme on sait, on va liquider provisoirement les engagemens de la caisse des écoles au moyen de l’emprunt de 319 millions. Or, en mars 1884, lors de la présentation du premier budget de 1885, au moment où M. Tirard, ministre des finances, venait de jeter ce cri d’alarme qui lui valut tant d’attaques de la part de ses amis politiques et qui remua profondément le pays, M. Paul Bert, renchérissant sur M. Jules Ferry, demandait au nom de la commission de l’instruction primaire, pour le personnel de ce seul enseignement, une augmentation de 23 à 24 millions, comme point de départ d’un accroissement graduel des traitemens, qui aurait eu pour conséquence, d’après les calculs de M. Jules Roche, rapporteur de la commission du budget, de porter en huit années le budget ordinaire de l’instruction primaire à 260 millions. Le 30 juillet suivant, M. Antonin Dubost, rapporteur du budget de l’instruction publique, en déplorant la nécessité où l’on était d’ajourner les projets de M. Paul Bert, évaluait les dépenses qu’il serait indispensable de faire, dans une très courte période, pour le matériel de l’enseignement, à 40 millions pour l’instruction supérieure, à 104 millions pour l’instruction secondaire et à 500 millions pour l’instruction primaire. Quant au personnel, le même rapporteur exposait que, bien que les crédits relatifs à l’enseignement primaire eussent été accrus de plus de 90 millions depuis 1870, il y avait lieu de prévoir de nouvelles augmentations qui les porteraient au chiffre de 163 millions; et il exhortait le parlement à envisager désormais une dépense annuelle de 250 millions comme le chiffre minimum du budget de l’instruction publique, en laissant à l’emprunt la tâche de pourvoir aux constructions à élever.