Oui, le problème est soluble par la double combinaison de l’obturation et de l’encombrement, et non-seulement pour les bâtimens de l’avenir, mais encore pour les grosses unités à double fond qui sont à flot. Oui, si l’eau, lorsqu’elle voudra envahir le corps flottant, rencontre un premier occupant qui lui dise : La place est prise.
Si l’on suppose que l’on prenne pour sujet d’expérience quelque vieux bateau et qu’on le bourre de liège, il est clair que, malgré les brèches que l’on pourra faire sur ses flancs, les lignes d’eau de cette épave resteront invariables. Nous avons supposé l’emploi du liège, parce qu’il était encore récemment le plus léger des corps connus et que l’exemple sera mieux saisi.
Toute l’idée de la construction navale militaire de l’avenir est contenue dans cet exemple si simple et si accessible. Le jour où la science aura donné une forme correcte à l’idée du bateau bourré de liège, c’est-à-dire à la conception d’un corps flottant encombré par une substance assez légère pour qu’on puisse en accepter la permanence dans tous les espaces qui ne sont pas nécessaires pour vivre, pour marcher et pour combattre, — elle aura produit un bâtiment de combat qui s’avancera sur le champ de bataille avec une fermeté impassible, à la façon de la statue de pierre, sans que les engins de destruction qui voudront s’acharner après lui, dans leurs coups, puissent retarder sa marche, et qui, ainsi, sera doué d’une vie artificielle suffisante pour la durée de son rôle de dévastation.
Pour indiquer dès à présent, dans ce préambule, les lignes principales du programme qui doit assurer l’assiette invariable d’un type capable de défier les trois modes de destruction, qui sont le projectile de grosse masse, l’éperon et la torpille, on peut dire que, pour parer aux effets du projectile et de l’éperon dans les coups obliques, il y a le matelas obturant, qui ne demande ni grands espaces ni grands poids, mais que cette ceinture protectrice pourra devenir insuffisante contre les coups droits donnés par l’éperon et contre certains effets de la torpille. Contre ces modes de destruction, quand ils seront poussés à leur maximum de puissance, il n’y a de certain que la protection par l’encombrement, au moyen d’un corps léger à poids invariable, succédant au matelas et le complétant. Et encore il doit demeurer entendu qu’il ne peut s’agir, pour les torpilles, que de celles qui sont portées ou lancées : la torpille de fond, à grosses charges accumulées, produira de tels effets de dispersion dans les eaux peu profondes, que toute protection, dans ce cas, paraît à l’avance sans objet. Ici, il faudra draguer l’obstacle, c’est-à-dire couper les fils électriques.
Ainsi, en premier lieu, une ceinture latérale, sorte de protection d’avant-garde au moyen de laquelle les brèches que fait l’artillerie