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modifiée. Plusieurs domaines importans ont été créés ou perfectionnés. La prairie s’est développée ainsi que l’élève des chevaux. Les pépinières et les fleurs y forment l’objet d’un commerce étendu qui approvisionne les jardins d’agrément qu’on trouve assez fréquemment dans cette région habitée par de riches propriétaires qui y ont leur résidence d’été. On nous y signale comme un fait commun la vente des terres par morceaux ; il n’y a pas lieu de s’en plaindre toujours, en raison de l’étendue exceptionnelle de certains domaines.

Située aux bords de la Vienne, la petite ville de Chinon rappelle le XVe siècle par quelques-unes de ses maisons et ne peut se séparer du joyeux patronage de Rabelais, qui y naquit. Des pensées plus sévères s’élèvent à la vue du coteau que dominent les ruines du château de Charles VII, où Jeanne d’Arc fit sa première apparition. À ces ruines intéressantes la ville a fait un cadre charmant de verdure ; on découvre de là l’admirable panorama qui s’étend de tous les côtés et place sous les yeux toute la variété des cultures de ce beau pays. Voisin de l’Anjou et du Poitou, l’arrondissement de Chinon montre la Touraine sous un aspect tout particulier. Les collines sont élevées ; les ondulations s’accentuent, les plaines s’élargissent, les champs ont souvent un air brillant de prospérité. Ce n’est plus la prairie du cours de l’Indre, mais un superbe verger, composé de vignes, de chanvre, d’oseraies, de plantations de toute espèce. Nulle part en Touraine le prunier et surtout le noyer n’apparaissent avec tant d’abondance. Ces innombrables noyers qui couvrent les terres hautes produisent annuellement plus de 300,000 décalitres de noix. L’huile de noix est la seule employée par la plus grande partie de la population. Sur les coteaux de la Vienne s’étagent de nombreux vignobles, parmi lesquels on distingue ceux qui produisent les vins dits de Chinon et de Bourgueil. Les terres à blé s’étendent sur les plateaux, particulièrement dans les cantons de Richelieu et de Sainte-Maure, mais de manière à suffire à peine à la consommation du pays. C’est à la diversité des cultures de tout genre que l’arrondissement de Chinon doit sa principale richesse. Peu de régions égalent ce territoire pour l’abondance et pour la beauté des fruits, qui réunissent toutes les espèces auxquelles la Touraine doit en ce genre son antique renommée. À ces sources de revenus s’en est ajoutée une toute différente dans l’élevage ; il s’est beaucoup développé jusqu’aux circonstances récentes qui ont amené une sorte d’arrêt.


L’état de la propriété, l’étendue des terres, leur mode d’exploitation par le fermage et le métayage, la situation des ouvriers ruraux appellent des remarques plus générales. La grande culture, qu’il ne faut pas d’ailleurs confondre toujours avec la grande propriété,