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intervenir dans le débat qu’avait soulevé l’exhumation soudaine de toute cette Grèce antérieure à l’histoire et même à l’épopée.

Cependant, parmi toutes les questions sur lesquelles de récentes trouvailles appelaient l’attention de la science contemporaine, il en est une qui l’a tenté tout particulièrement et dont il a fait son domaine propre, c’est celle de l’origine et de l’interprétation des monumens de la Syrie septentrionale et de l’Asie-Mineure. Depuis six ou sept ans, par de nombreux mémoires dont nous n’avons cité que le plus important, il a, plus que personne, contribué à répandre et à accréditer l’hypothèse qui est aujourd’hui généralement admise, celle qui attribue l’invention de cette écriture et la création de ces types plastiques à ce peuple des Khiti, dont le nom revient si souvent dans le poème célèbre de Pentaour, ce fragment d’une Iliade thébaine où l’Homère égyptien chante les exploits d’un héros aussi brave et non moins invincible qu’Achille, de Ramsès, le fils chéri d’Ammon.


II

Ce sont les récits de bataille et les bulletins de victoire gravés sur les murs des temples de Thèbes et des palais de Ninive qui ont permis à notre curiosité de deviner quelle place avait tenue longtemps, dans le monde oriental, la nation belliqueuse dont nous allons résumer l’histoire, telle que permettent de la reconstituer les documens que nous traduisent les égyptologues et les assyriologues. Cependant, alors que les hiéroglyphes et les cunéiformes étaient encore lettre close, on pouvait déjà lire dans la Bible le nom de ce peuple ; il s’y trouvait sous les formes hitti, au singulier, hittim[1], au pluriel ; ailleurs on rencontre l’expression benê-het, « fils de Ilet. » Chez les Septante, on a les variantes grec. DE cette dernière a été tiré le terme hétéens ou hétiens, dont se servent nos versions de l’Ancien-Testament ; c’est celui que nous emploierons, de préférence au mot hittites, que les savans anglais ont emprunté à leur traduction de la Bible. Sans doute, c’est surtout à eux que ce peuple doit d’avoir inopinément reparu sur la scène de l’histoire ; mais ce n’est pas une raison pour que nous nous croyions obligé d’habiller à l’anglaise un ethnique qui, s’il veut passer dans la nomenclature française, doit se

  1. On trouvera de longs extraits du poème de Pentaour dans les histoires anciennes de MM. Maspero et François Lenormant. Les Khiti sont ceux que d’autres égyptologues appellent Khetas et Khétaou ; pour la vocalisation de ce nom, nous avons suivi M. Maspero, et, en général, nous lui avons emprunté ses transcriptions des noms de peuples ou de villes cités dans cet article.