du moins, les libéraux dissidens et les conservateurs, à faire cause commune, qui ne se laissent pas prendre à un dilemme plus ou moins habile. Autant le chef du ministère évite de s’expliquer sur les combinaisons, sur les détails du bill qu’il présentera de nouveau, autant ses adversaires insistent sur la nécessité de ne pas surprendre l’opinion, de ne pas demander un vote au pays sur d’aussi graves mesures sans dire sous quelle forme et comment ces mesures se réaliseront. Et puis il y a une considération qui n’est point sans avoir son rôle dans ces débats des partis, qui est peut-être la force secrète de l’opposition. On se dit qu’une révolution comme celle qui est proposée est toujours difficile, laborieuse, qu’elle exige beaucoup de temps, que le succès de la politique irlandaise du ministère dépend absolument de M. Gladstone, et que M. Gladstone est un vieillard presque octogénaire, qui peut manquer à tout instant, laissant le parti libéral, le pays tout entier dans les embarras d’une révolution interrompue. Il y a de quoi hésiter. De sorte que jusqu’au bout, les chances peuvent paraître partagées entre les deux camps, et qu’il est difficile de dire de quel côté se tournera l’opinion dans une affaire où il s’agit après tout de l’intégrité de la puissance de l’empire britannique.
Au moment où ces luttes régulières d’un peuple libre sont engagées, cependant la reine Victoria vient d’entrer dans la cinquantième année de son règne. La célébration du jubilé royal paraît avoir été ajournée par la volonté de la souveraine à la fin de l’année ; elle n’a été accompagnée aujourd’hui que de démonstrations sans éclat faites uniquement pour prouver que l’anniversaire ne passait pas inaperçu. Depuis un demi-siècle, la reine Victoria préside paisiblement aux destinées d’une des plus puissantes nations du monde, et pendant ces cinquante ans, sous cette monarchie constitutionnelle forte et respectée, on n’a pas entendu dire que l’Angleterre ait reculé devant aucun progrès, qu’elle ait perdu une seule de ses libertés, qu’elle ait flotté sans cesse entre les révolutions et les réactions. Ce que l’Angleterre fêtera dans les noces d’or de la reine, ce sera sa propre prospérité dans la puissance, sa propre liberté garantie par des institutions tutélaires.
On est aujourd’hui à un moment d’élections. Les Anglais sont encore en pleine lutte ; la Belgique, il y a quelques semaines, renouvelait une partie de son parlement. L’Italie est au lendemain d’un scrutin qui lui a donné une chambre où M. Depretis ne trouve peut-être pas la majorité sur laquelle il comptait. La Hollande, à son tour, vient d’avoir les élections de sa seconde chambre et elle aura d’ici à peu un renouvellement partiel de sa première chambre. Tous ces scrutins se pressent. Quelles seront aujourd’hui les conséquences de ces élections hollandaises que la division des partis et l’impossibilité d’arriver à une entente sur cette vieille question de la révision constitutionnelle avait rendues nécessaires ? Dans la dernière chambre, les libéraux et les