Page:Revue des Deux Mondes - 1886 - tome 76.djvu/124

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
UNE
AMBASSADE AU MAROC

II.[1]
LA VIE FÉODALE. — DERNIÈRES JOURNÉES DE MARCHE.


V. — LA VIE FÉODALE.

En me réveillant à quatre heures du matin au bord du Sbou, je ne fus pas surpris de me trouver enveloppé dans un brouillard opaque. Je commençais à m’habituer au climat du Maroc ; ayant rencontré partout une humidité pénétrante, je ne pouvais être étonné qu’elle fut plus épaisse encore qu’ailleurs sur les rives du plus grand fleuve du pays. Nous partîmes, sinon avant le lever du jour, du moins avant qu’il fît clair, tant la brume répandait d’obscurité sur la campagne. Nos cavaliers semblaient glisser dans les ténèbres, comme les ombres impalpables des champs Elysées de Virgile. Nous marchions vers le territoire de la tribu des Beni-Ah’sen, où nous devions camper près de la k’oubba de Sidi-Gueddar, un saint fort célèbre au Maroc, car c’est lui qui annonça aux deux premiers princes de la dynastie actuelle qu’ils monteraient sur le trône et deviendraient maîtres de la contrée. Les Beni-Ah’sen ont la plus déplorable réputation ; ils passent pour les plus déterminés voleurs

  1. Voyez la Revue du 15 juin.