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II.

Avant d’entrer en matière, il est indispensable de rappeler certaines notions sur les torpilles, afin que chacun, dans le public, puisse être à même de comprendre la valeur des expressions en usage et se rendre un compte suffisant de la question dont on lui parle taux.

Tout le monde, sans doute, sait qu’une torpille est, suivant la définition du Manuel des défenses sous-marines, « un vase métallique clos et bien étanche, rempli de poudre ou de toute autre matière explosible et qu’on fait éclater sous l’eau, au contact ou dans le voisinage de la coque d’un navire ennemi. » Mais bon nombre de personnes n’ont pas eu l’occasion d’en apprendre davantage là-dessus, quelle que puisse être leur instruction sous un autre rapport. C’est ainsi que j’ai entendu confondre entre elles les torpilles, entre eux les torpilleurs, et attribuer aux uns les propriétés et les exploits des autres ; prendre, par exemple, les torpilleurs porte-torpilles de l’escadre de l’amiral Courbet, dont quelques-uns n’étaient que les canots du vaisseau le Bayard, auxquels on avait adapté l’appareil nécessaire, pour les torpilleurs lance-torpilles actuellement en expérience dans l’escadre de la Méditerranée, et croire que ceux-ci faisaient partie de l’escadre de Chine et naviguaient avec elle. Comment ceux qui commettent une confusion semblable y et qui ne distinguent pas entre la torpille portée et la torpille automobile, peuvent-ils se faire une idée saine de la question qui s’agite ? Et cependant il s’en trouve beaucoup, parmi ceux-là, qui n’hésitent pas à se prononcer de confiance et chaudement pour la torpille à outrance et contre les vaisseaux. Telle est l’influence que le courant de l’opinion peut exercer sur la solution des questions les plus graves et les plus spéciales. On voudra donc bien m’excuser d’allonger cette étude en la faisant précéder des courtes explications qui suivent :

Toutes les torpilles en usage comme arme de guerre peuvent se rattacher à cinq espèces : 1° la torpille fixe, qui est dormante ou mouillée ; 2° la torpille mobile ; 3° la torpille portative ; 4° la torpille remorquée ; 5° la torpille automobile.

La torpille fixe est appelée dormante si elle repose sur le fond de la mer, et mouillée si elle est maintenue entre deux eaux au moyen d’ancres et de chaînes. La torpille dormante est reliée au rivage par des fils métalliques au moyen desquels l’opérateur y met le feu à volonté par l’électricité ; c’est pourquoi elle est dite torpille électrique. L’opérateur saisit, pour la faire éclater, le moment ou un navire ennemi passe au-dessus ou très près de la torpille. La