Page:Revue des Deux Mondes - 1886 - tome 75.djvu/442

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

puissance de leur armement sur les alliés de Solferino, ni pour restaurer l’absolutisme, que nos soldats avaient reparu sur le territoire romain. Ils étaient venus pour faire respecter un traité que le gouvernement italien nous avait spontanément offert et que la révolution avait outrageusement foulé aux pieds. Le commandant de notre expédition avait l’ordre d’ailleurs de n’intervenir qu’à la dernière extrémité ; ses bataillons n’étaient entrés en ligne qu’à la fin de la journée, pour soutenir les soldats romains, qui, depuis quatre heures du matin luttaient contre des forces écrasantes. Il y avait péril en la demeure ; devions-nous assister l’arme au bras à la déroute de nos alliés que l’Italie, par ses fautes, nous imposait ?

L’impression laissée par cette douloureuse et sanglante répression n’en fut pas moins salutaire ; elle permit au roi et à son ministère de mettre un terme aux saturnales révolutionnaires, de faire prévaloir les principes d’ordre. La révolution déconcertée était écrasée ; les bandes se dérobaient dans toutes les directions ; l’autorité était rétablie dans les états de l’église. Partout les troupes pontificales étaient accueillies avec sympathie et souvent avec enthousiasme. C’était la conséquence des exactions commises par les bandits qui s’étaient mêlés aux volontaires. Ils avaient dépouillé les églises, profané les vases sacrés, ils avaient frappé d’énormes contributions, fait de scandaleuses réquisitions : Viterbe avait dû payer 200,000 fr. Les journaux italiens confessaient qu’il se trouvait dans les rangs des volontaires « des hommes indignes de porter la chemise rouge, » et M. de Gualterio, le ministre de l’intérieur, disait à M. de La Villestreux que Garibaldi lui-même était épouvanté de la quantité de scélérats qui l’entouraient.

L’Italie échappait à un grand danger ; prise d’un accès de fièvre chaude, elle s’était engagée dans une folle et périlleuse aventure, elle s’était laissé déborder par la révolution. Mentana la rappelait brusquement à la raison et lui rendait le sang-froid. À ce titre, les chassepots avaient réellement a fait merveille ! » Ils avaient sauvé le roi et l’unité[1] en frappant les bandes de Mazzini et de Garibaldi qui, sous prétexte de l’installer à Rome, conspiraient contre la monarchie. Le général Menabrea tenait en main tous les fils de la conspiration.

  1. Dépêche du baron de La Villestreux. — « Florence reste calme, mais on y redoute le contrecoup des manifestations mazziniennes, qui éclatent de tous côtés. Les troupes restent en partie consignées ; et, par mesure de précaution, le gouvernement continue à faire garder les abords de la légation par de la ligne et des carabiniers. Le roi, qui ne quitte plus ses appartemens, a fait placer depuis quelques jours deux pièces d’artillerie dans le jardin Boboli, derrière le palais. La police a découvert dans plusieurs villes des comités mazziniens, des dépôts d’armes et de munitions ; elle sait que tout était préparé pour faite éclater un soulèvement général à un signal donné : c’est donc contre un mouvement mazzinien très puissant, préparé de longue date, qu’il s’agit de lutter. »