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considérable, 1,272,000 balles, soit 40 pour 100 de plus que cinq ans auparavant ; les prix reculent dans une proportion à peu près analogue. Pendant les deux ou trois années suivantes, les apports de laines coloniales restent stationnaires et les prix montent. Mais l’accroissement de la production reprend ; l’importation des laines en Europe est estimée à 1,740,000 balles en 1885 ; les prix descendent dans des proportions notables. En 1880, on évalue les apports probables des laines coloniales à 1,880,000 balles, soit le double des importations de 1872 et le quadruple de celles de 1864. Comme le dit avec beaucoup de bon sens ce commerçant qui n’est pas au courant des subtilités des financiers bimétallistes : « Il est hors de doute que le chiffre de la production des laines est le grand régulateur des prix, et que, comme quelques autres articles, tels que les grains, cafés, etc., les laines n’ont pas su résister aux fortes augmentations régulières de la production qui en ont réduit la valeur vénale[1]. » Comprend-on que des abstracteurs de quintessence aillent chercher une cause mystérieuse à la baisse des prix quand la cause réelle est si palpable et qu’il suffit, pour la voir distinctement, de ne pas fermer les yeux ?

L’accroissement de la production est considérable aussi, quoique beaucoup moindre, pour le café, dont il se produisait, dans les contrées en relation avec l’Europe, 321,000 tonnes en 1855, 422,000 tonnes en 1865, 505,000 tonnes en 1875, et, enfin, 588,000 tonnes en 1881. Ici, l’augmentation est plus faible, puisque en seize ans elle n’atteint guère que 40 pour 100, mais la consommation se développe beaucoup plus lentement, comme pour tous les objets de luxe ou de demi-luxe. La production du sucre, grâce en grande partie aux primes de toute nature que les états distribuent avec une niaise prodigalité aux fabricans, s’est plus rapidement accrue encore que celle du café. M. de Neumann-Spallart évalue à 16,750,000 quintaux métriques la production du sucre de canne dans le monde civilisé en 1867 ; l’augmentation est très lente jusqu’en 1877, où cette production atteint 18,800,000 quintaux ; mais dans la campagne 1881-82 elle dépasse 25 millions de quintaux métriques offrant un accroissement d’un tiers environ en cinq années. La production du sucre de betterave ne reste pas en arrière, et de 15,066,000 quintaux métriques en 1879-80, elle monte à 21,709,000 quintaux en 1882-83, soit une augmentation de 40 pour 100 en trois années. Depuis lors, il semble que la production du sucre ait pris encore de nouveaux développemens. Quoi d’étonnant que la consommation suive à pas inégal une offre qui s’élargit dans

  1. Voir cette circulaire commerciale, qui est décisive, dans l’Économiste français du 7 février 1886.