d’Autriche, le prince de Reuss, leur remit, le 27 juillet, un mémoire rédigé d’après les instructions de Kaunitz. Il avait pour objet d’établir une entente sur toutes les mesures à prendre en vue du concert ; parmi ces mesures, l’Autriche indiquait expressément une déclaration commune des alliés écartant toute idée de conquête. Les ministres prussiens n’en délibérèrent pas longtemps ; dès le lendemain, ils soumirent au roi une réponse que ce prince approuva et qui fut incontinent expédiée à Jacobi, chargé des affaires de la Prusse à Vienne. Ce document se signalait par le sens pratique, qui est, en général, le propre de la chancellerie de Berlin. Le ton n’en était pas celui de l’enthousiasme, ni l’esprit celui du désintéressement. Le roi acceptait l’idée du concert, mais il ajournait toute démarche effective après l’entière pacification de l’Orient, c’est-à-dire après la conclusion de la paix entre les Turcs et la Russie. Il refusait de rompre les relations de commerce avec la France, parce que ses sujets en souffriraient. Il demandait à être éclairé sur les intentions des autres puissances, et, en particulier, sur celles de l’Angleterre. Puis, découvrant la pensée intime, la pensée de derrière la tête, qui allait devenir bientôt la pensée maîtresse de toute la négociation, il faisait observer que le système de désintéressement se comprendrait fort bien tant qu’il ne s’agirait que de sauver Louis XVI et de le rétablir sur le trône : « Mais, poursuivait-il, que ferions-nous si la guerre amenait un résultat différent et peut-être plus vraisemblable, si l’établissement d’un nouvel ordre de choses en France rencontrait des difficultés insurmontables et si, néanmoins, les armes des puissances alliées avaient opéré la facile conquête de l’Alsace et de la Lorraine ? Il n’y aurait, dans ces conjonctures, aucune raison de les restituer à la France. Les princes allemands recouvreront tous leurs droits, mais les possessions de ces princes ne représentent guère qu’un quart de ces provinces ; que fera-t-on du reste ? S’il s’agissait alors de le restituer à son ancien souverain, la maison d’Autriche, il est clair que cette restitution ne pourrait me laisser indifférent et que, si, au préalable, un accord ne se faisait pas sur cet objet et sur les moyens de me procurer un dédommagement équivalent, il en pourrait résulter des scissions, peut-être même une rupture complète entre les alliés. Il est donc, à mes yeux, de la plus haute importance de s’entendre d’avance sur ce point. »
Les ministres prussiens avaient déjà jeté leur dévolu sur la Silésie autrichienne. Ils ne connaissaient pas encore le traité préliminaire de Vienne ; lorsqu’ils en furent informés, ils jugèrent que Bischoffswerder était allé beaucoup trop vite en besogne, qu’il s’était