ce n’était pas à des enfans, comme dans le cas actuel, que s’adressait le nouvel enseignement, c’était à de grands jeunes gens de philosophie, déjà faits et fort en état de se défendre. La même presse et les mêmes hommes voudraient aujourd’hui nous convaincre de l’innocence d’un enseignement tout politique donné par des instituteurs primaires, sous l’œil et dans la main du préfet, à des gamins de dix ans. En vérité, c’est pousser un peu loin la plaisanterie.
Au surplus, consultons les documens, c’est-à-dire, dans l’espèce, les livres de classe et de lecture et demandons-leur un complément d’instruction ; car si la valeur d’un programme ou d’un système d’éducation dépend beaucoup du maître chargé de l’appliquer, elle se mesure encore plus exactement peut-être aux instruirions qu’il emploie.
Or, sans insister sur aucun, quelle est la caractéristique, la tendance de toutes les petites histoires et de tous les manuels qui circulent depuis dix ans dans nos écoles ? Dans quel esprit les meilleurs eux-mêmes ont-ils été rédigés ? Il y a, pour s’en rendre compte, une pierre de touche infaillible, c’est de comparer les jugemens qu’ils portent sur des faits de même ordre et d’en noter les nuances. Voici, par exemple, le 18 fructidor et le 18 brumaire. Des deux parts l’illégalité, l’abus de la force, la violation du droit sont flagrans, et dans les deux cas le résultat matériel est le même ; c’est une révolution ajoutée à tant d’autres. Conclusion ad usum juventutis : les coups d’état, d’où qu’ils viennent, ne valent pas mieux les uns que les autres, et, si l’histoire a raison de condamner ceux-ci, elle n’a pas le droit d’absoudre ceux-là.
Eh bien ! cherchez cette conclusion, cette moralité, chez les Paul Bert ou chez les Compayré, pour ne citer que ceux-là. Cherchez dans toute cette littérature officieuse un écrivain, un seul, qui ait eu le courage de dire son fait à la révolution et à la démocratie, qui pèse dans la même balance la Saint-Barthélémy et le Dix-Août ; la révocation de l’édit de Nantes et les lois sur l’émigration. « Cherchez… et vous ne trouverez pas. »
Vous en trouverez dans le nombre un ou deux qui auront su garder dans leurs appréciations sur les hommes et sur les choses d’autrefois une certaine bienséance, et dont les jugemens sur les hommes et sur les choses du jour ne sont pas de pures flagorneries. Mais ôtez ceux-là et passez les autres en revue. Vous n’y rencontrerez pas un chapitre, et chez quelques-uns même une page où n’éclate le parti-pris évident de rabaisser tout ce qui tient à l’ancienne France, pour exalter la république et les républicains.
Je ne m’indigne pas, je constate. Sous la monarchie de juillet, si l’instruction civique eût existé, les catéchismes et les petites histoires