atteindre le prix de 300 francs l’hectare ; c’est un prix que l’éleveur des pampas ne saurait, lui, accepter, et que seul, l’agriculteur peut supporter à force d’efforts et de capitaux : si l’éleveur du Texas et des États-Unis peut payer ces prix élevés, c’est qu’il vend son bétail trois et quatre fois plus cher que celui des pampas et d’Australie, c’est que la consommation locale lui offre des débouchés importuns. Ce sont ces raisons aussi qui l’empêchent de songer à l’exportation de ses produits : c’est donc encore pour le moment un concurrent à négliger.
Des détails que nous avons donnés jusqu’ici sur les pays d’Europe et les régions exotiques où l’élevage est possible et pratiqué, on peut conclure que, sauf la Russie méridionale, qui peut fournir un appoint aux pays de l’Europe occidentale dont la consommation de viande dépasse la production, toutes les contrées, même celles qui ont une certaine notoriété comme productrices, ont peine à se suffire à elles-mêmes dans les conditions actuelles d’une consommation tout à fait inférieure à ce que peuvent souhaiter ceux qui désirent voir s’augmenter le bien-être de l’humanité. Quant aux pays exotiques, ce que nous avons dit suffit à démontrer que le bruit qui se fait autour de leur production, les craintes qu’ils inspirent à l’éleveur européen, les espérances qu’ils donnent au consommateur, ne sont pas chimériques.
Et cependant, si l’on entend quelquefois un Européen parler de viandes exotiques, c’est comme d’une curiosité qu’il aura vue apparaître sur quelque table de banquet de société en formation. Il déclarera par politesse ou conviction que le goût en était excellent, mais jamais, depuis, il n’aura en l’occasion de contrôler cette première impression. Aussi bien en Angleterre qu’en France, il en va tout de même ; dans ce pays que l’on nous représente quelquefois comme envahi par les viandes exotiques, c’est aussi dans les banquets spéciaux de propagande que la gentry apprécie le goût de cette viande, qui n’apparaît même sur les marchés qu’en proportion négligeable.
Il y a plus d’un demi-siècle que la science et l’industrie unissent leurs efforts pour résoudre ce grand problème du transport des viandes et de l’union des grands producteurs et des grands consommateurs. À cette date éloignée, il n’y avait pas même lieu de se préoccuper encore d’enlever aux premiers un trop plein qui n’existait nulle part, que la légende seule avait créée, en particulier