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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 mars.

Voici cinq mois bien comptés qu’il y a eu en France des élections, que les partis ont pu interpréter et commenter à leur manière, qui restent, dans tous les cas, l’expression saisissante et caractéristique d’un des plus vifs, d’un des plus sérieux mouvemens d’opinion. Pendant ces cinq mois qui viennent de s’écouler, la chambre issue de ces élections s’est réunie une première fois pour la session extraordinaire qui a clos la dernière année, une seconde fois pour la session ordinaire qui a ouvert l’année nouvelle et qui dure depuis deux mois déjà. Qu’a donc produit cette double session? Comment le temps a-t-il été employé? Par quels actes utiles, profitables pour le pays, s’est manifesté le parlement nouveau? Tout bien compté, on n’a à peu près rien fait, rien fait du moins de ce qu’on aurait pu attendre d’une assemblée laborieuse et bien inspirée. L’histoire de cette double session, de ces douze ou quinze semaines de vie parlementaire, serait bientôt écrite : elle pourrait se résumer dans beaucoup de temps perdu, beaucoup de velléités impuissantes et de vaines querelles. Tout ce qui n’est pas intrigue ou manœuvres de parti laisse assez froids ces représentans de la France. Les questions les plus sérieuses, celles qui exigent une étude attentive et réfléchie, sont successivement ajournées. Les intérêts les plus pressans, les intérêts positifs et pratiques du pays, sont à peine pris en considération. Le budget n’est même pas encore présenté. En revanche, il est vrai, les interpellations, les excitations et les motions de parti n’ont pas manqué. On a employé ou perdu tout le temps qu’on a pu à exercer des représailles électorales, à prononcer des invalidations passionnées, à discuter sur l’amnistie ; on dirait que toute la politique de certains républicains se réduit à soulever des questions inutiles