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Le cabinet s’est engagé à présenter un budget en équilibre sans contracter un grand emprunt de liquidation et sans créer de nouveaux impôts. On s’est mis à la recherche des combinaisons qui pourraient permettre la solution de ce problème complexe, et la supposition s’est répandue un peu partout en Bourse que ces combinaisons devaient fatalement aboutir à la création de nouveaux titres de rente perpétuelle ou amortissable. On parlait notamment d’un projet de conversion de l’ancien 4 1/2 en 3 pour 100, et d’un autre projet plus vaste embrassant la consolidation d’un grand nombre de dettes du Trésor à court terme.

Les intentions ainsi attribuées au ministère des finances ont été officieusement démenties. Les rentes se sont alors relevées assez vivement, le 3 pour 100 jusqu’à 81.75, le 4 1/2 jusqu’à 109.45. Mais cette reprise manquait de solidité, et, sur le bruit que les affaires prenaient une tournure peu pacifique en Orient, que la Serbie et la Bulgarie mobilisaient de nouveau leurs armées, et que l’Europe n’acceptait pas sans réserve l’arrangement turco-bulgare, les ventes de rentes françaises ont recommencé, ventes prudemment conduites d’ailleurs, et qui s’arrêtaient aussitôt que le marché ne paraissait plus en mesure de les supporter.

A la fin de la semaine, un nouveau revirement s’est produit, sur deux dépêches anglaises annonçant que la question de la paix, entre la Bulgarie et la Serbie, avait fait un pas décisif. Le 3 pour 100 termine la première quinzaine de février à 81.60, et le 4 1/2 à 109.40, soit respectivement à 0 fr. 55 et 0 fr. 40 au-dessous des derniers cours de compensation.

Il est probable que la reprise aurait été plus vive si les nouvelles pacifiques données dans la matinée du samedi par des journaux anglais n’avaient été, sinon démenties, du moins rendues suspectes par des informations ultérieures d’un caractère beaucoup moins rassurant.

Ce qui a surtout empêché la spéculation et en même temps l’épargne de céder trop longtemps aux tendances pessimistes qui régnaient au début du mois, c’est l’attitude brillante de la plupart des fonds d’états étrangers, cotés en hausse sur les cours de fin janvier en dépit de tous les incidens politiques et des craintes concernant le maintien de la paix en Orient.

Les Consolidés anglais, malgré l’émeute du 8 février à Londres et les désordres si graves de Leicester, ont gagné une demi-unité dans cette quinzaine et restent à 100 15/16. Tandis que le pays était si vivement ému de l’explosion de cette crise socialiste, la liquidation s’opérait au Stock-Echange avec la plus grande facilité, révélant des disponibilités considérables et encourageant les marches du continent à persister dans la voie de la hausse.