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1 million dans l’inventaire de 1791, « dont l’estimation est considérée par le rapporteur de la chambre des députés comme un minimum. » En 1867, on l’offrait pour une somme de 700,000 francs, prix de demande. Il fut alors exposé au Champ-de-Mars et tous les souverains étrangers vinrent le voir. Cependant, il n’y eut jamais de proposition d’achat, et le Sancy est encore à vendre.

Il nous reste à rappeler aux pouvoirs publics un fait assez curieux : nous avons vu qu’en 1814 l’empereur d’Autriche avait fait reprendre à Marie-Louise les diamans de la couronne, qu’elle avait emportés à Mois, et que François II les avait tout de suite fait remettre à Louis XVIII. Parmi ces diamans se trouvaient 600,000 fr. de pierres achetées par Napoléon sur la cassette particulière et lui appartenant, par conséquent, en propre. L’empereur est toujours créancier de ces 600,000 francs, qui auraient dû lui être rendus, selon les principes du droit moderne, comme on l’a fait, en 1875, pour les acquisitions personnelles de l’impératrice Eugénie. Si l’on vend les diamans de la couronne, 600,000 francs devront donc être prélevés sur le produit de la vente au profit des représentans de Napoléon Ier. Quels sont ces représentans ?

Napoléon III ayant renoncé à toute réclamation au sujet des confiscations prononcées en 1814 et en 1815 contre la famille Bonaparte, les représentans actuels de Napoléon Ier sont, aux termes du testament et des codicilles de l’empereur les officiers et soldats qui ont combattu pour la gloire et l’indépendance de la nation depuis 1792 jusqu’en 1815.

Quand bien même, en vertu d’une raison d’état que, pour notre part, nous n’admettons pas on laisserait de côté ceux qui sont morts de 1800 à 1815, on se trouverait encore en présence des soldats qui tombèrent pour la défense de la patrie envahie, de 1792 à 1800, de ces volontaires, de ces héros de Sambre-et-Meuse, de ces Mayençais, des soldats de Marceau, de Kléber et de Hoche, qui ont laissé des veuves, des enfans et des petits-enfans. Il en est aujourd’hui qui meurent de faim. L’intention formelle, manifestée par l’empereur dans ses dernières volontés, était justement de les secourir. S’arrogera-t-on le droit de les priver de leur pain, lorsque ces 600,000 francs leur ont été laissés pour assurer leur existence ? Que l’on fasse, comme on voudra, le calcul de ce que pourra rapporter cette vente, en tenant compte du manque d’argent et de l’absence d’affaires et en déduisant les frais auxquels donnera lieu l’opération, on n’obtiendra qu’un chiffre insignifiant, dérisoire.

Il faut encore dire un mot des dangers que peut présenter la vente. Le gouvernement se préoccupe, ajuste titre, de la condition et du sort des ouvriers. Si la vente des diamans de la couronne a