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un dernier effort pour constituer la monarchie représentative. Leurs tentatives infailliblement échouaient s’ils n’osaient pas réviser la constitution. L’histoire nous a appris comment le comité, n'ayant pas la certitude d’être soutenu contre les attaques de la sur droite de l’assemblée et contre les folies des démagogues, se renferma strictement dans son programme et, hormis deux ou trois points insignifians, ne changea rien aux vices de la constitution de 1791. Malouet, qui essaya de porter le débat sur les articles fondamentaux, fut rappelé à l’ordre, a Les aristocrates, avoue le marquis de Ferrières, ne voulurent prendre aucune part à la révision et laissèrent, en se frottant les mains, les jacobins battre les constitutionnels. »

Si les fautes des adversaires n’excusent pas celles qu'on fait soi-même, elles devraient du moins atténuer la sévérité du jugement. Faire rétrograder la révolution jusqu'à l’ancien régime à l’aide des armées étrangères, ou la précipiter dans l’anarchie et dans le sang, au moyen de l’organisation jacobine, tel fut le problème qui se posa devant les députés des classes moyennes, le 30 septembre 1791, au moment où la constituante se séparait et où une assemblée dont elle avait exclu ses membres prenait séance. Quelque bien douée qu'elle soit, une nation n’a pas deux fois, dans la même période, une pléiade de penseurs, de jurisconsultes, d’orateurs, de philosophes. Elle n’a pas même deux fois, lorsque l’éducation politique est à faire, le groupe silencieux, mais pondérateur, des hommes de bon sens. Aussi, sauf quelques individualités laissées en dehors par les élections de 89, sauf quelques jeunes gens éloquens et héroïques, qui n’avaient jamais vu de près les difficultés pratiques, les votes s’étaient portés sur les représentans de la petite bourgeoisie, ou sur les personnages secondaires appartenant aux professions libérales et aux congrégations dissoutes. Les projets libéraux rêvés par la haute bourgeoisie rencontraient comme obstacle, dans l’assemblée législative, un parti nouveau, confus, violent, organisé avec les clubs et déterminé à aller jusqu'au bout.

Les mœurs bourgeoises subissent le contre-coup des événemens. L'influence incroyable des tableaux de David sur le goût et les modes n’en était que le résultat. Les femmes avaient abandonné le charmant costume du XVIIIe siècle qui leur allait si bien. La poudre qui adoucissait leur visage, la mouche qui en relevait la pâleur, les corsets et les souliers à talon étaient proscrits. En substituant aux robes dites de cour, des vêtemens légers, simples, unis, étroits, l'étiquette était supprimée peu à peu. Les habitudes rigoureuses d'exquise politesse se perdaient. Les hommes avaient adopté le vêtement noir et la coiffure flottante. L’introduction d’un costume